Cyclo.

Description

Quelqu'un l'a pris sur la berge, là, parmi les autres galets. Quelqu'un l'a soupesé, vaguement examiné. Et puis l'a lancé. Jeté dans une eau glacé. Et maintenant, le galet coule. Il coule, et personne ne vient le repêcher.


Cyclo vous est supérieur. Il n'y a aucune chance que son passé ne l'enferme, ou qu'il souffre de par sa mémoire. Laissez-moi vous expliquer.
Contrairement à vous, Cyclo n'a pas de souvenirs douloureux. Ou peu. Ils s'estompent vite. Ils se mélangent. Et Cyclo a du mal a distinguer le vrai du faux.
Lorsqu'un gouffre se creuse, sa mémoire ne peut que vainement tenter de rafistoler. Un peu.
Cyclo c'est un bâtiment qui s'effondre. Des pierres disparaissent. On met de la boue à la place, en attendant qu'elles reviennent, en espérant que ce sera le cas.
Non, non! Cyclo n'est pas cela, c'est faux! C'est un roc dur que rien de peut faire flancher, je vous l'assure! Ses trous font partie de lui-même et contribuent à sa solidité! Il n'a pas besoin d'attaches, ni de repères. Il peut se réinventer une vie lorsqu'il vient d'en perdre une partiellement. Il peut aisément vous oublier, vous laisser tomber sans remord. Il vous méprise!

Il est si frivole. Si peu inquiété de l'avenir. Il prend tout à la légère, même sa propre vie. Il n'a peur de rien.
Oui, exactement. C'est ça. Il vient si facilement à vous. Il paraît gentil. Parle avec tant d’insouciance (cyance /crève) de la mort, de possibilités dangereuses. Il a tant d'assurance.
Mais il se fiche de votre vie autant que de la sienne. Après tout, il est tout troué. Et dès qu'il se remplit, presque tout s'en va, presque tout s'écoule. Alors à quoi bon?
Et vous, avec votre facilité, vous et votre incompréhension, si vous saviez comme il vous est amer. Elle est si vaste, son amertume. Il a beau mettre des tonnes de sucre pour la diminuer, pour se la cacher, elle est toujours plus présente. Sa rancœur est si puissante. Sa jalousie si réprimée. Vous le dégoûtez avec votre aisance.  
Pourtant, la première fois, il aura certainement des liens normaux. Des émotions normales. Au moins en apparence. Il peut même vous être réellement attentif, et se soucier de vous, si vous en valez la peine. Et ne pas faire seulement semblant.
Ce sont les zones d'ombres qui feront la différence. Il ne sait pas comment réagir avec ceux qu'il a connu un jour lorsqu'il n'a plus rien. Et c'est à partir de là qu'il devient moins fréquentable. Qu'il peut éventuellement vous être dangereux.
C'est exactement à partir de là que votre présence le rend instable. Qu'il devient difficile de prévoir ses réactions.


Le galet coule, coule, de plus en plus vite. Il fait nuit encre dans l'eau. Sur la plage, les autres pierres lisses et plates qui en sont les plus proches commencent à trembler.


Ne l'approchez pas, éloignez vous du cyclone avant qu'il ne vous emporte, avant qu'il ne vous détruise vous aussi. Il n'est plus celui que vous avez connu. Fuyez s'il est à nouveau sympathique. Il est bien trop changeant. Votre existence qu'il connaissait autrefois le trouble. Allez-vous-en.


De plus en plus vite. Comme s'il souhaitait que les autres pierres le suivent dans sa chute. Comme s'il voulait qu'elles sombrent avec lui.


Il est au-dessus de vous. Il ne souffre pas.
Et puis non, c'en est assez, laissez tomber ces idioties. Il n'a pas mal à cause de ses souvenirs, oui, mais il est ravagé par leur absence. Et il se bat, tant bien que mal. Il a engagé un combat perdu d'avance contre l'amnésie. Il lutte sans résultat pour conserver un peu de ses données. Et s'écroule. Se relève. Toujours avec plus de mal. Toujours avec plus de détermination. Ne pas flancher. Ne pas montrer qu'on est sur le point de le faire. Ne pas laisser voir son ressentiment. Se maîtriser. Et combattre, encore et encore.
Pour se souvenir.
Pour se construire.
Et rester.



Il est réveillé. Ses yeux ne sont pas encore ouverts, mais il est bel et bien conscient. Il a fait un drôle de rêve. Un rêve où il était un pierre qui s'enfonçait de plus en plus loin dans des ténèbres glacées. Un rêve où... Où... Trou.
Tiens? Sa vue s'ouvre sur un vaste espace rose, animé de nombreuses images mouvantes. Il ne se rappelait pas que c'était ainsi. C'est... Tellement... Vide. Pourquoi...? Attendez, comment s'est-il retrouvé ici? Flou.
Résignation. Il referme les yeux. Sombre. Dans le sommeil.
Qui sait vers quels songes agités?
Non, pour l'instant, son visage affiche juste un air paisible, une expression placide. Mais pour encore combien de temps?



En résumé parce que c'est assez chaotique, tout ça, Cyclo c'est un amnésique veut paraître bien le vivre et en est fier ou pas, qui se ment à lui même autant qu'aux autres, qui est instable, égoïste et puis. Mince le résumé est encore pire que le reste. Tant pis! /fuite ninja.