Déchetterie

Alors qu'il jouait encore à fouiller la déchetterie, non sans écouter plus ou moins ce qui se passait, Lucas perçut ce qui lui sembla être un tremblement. De léger, il parut soudain puissant. Juste un instant après, il était devenu oppressant. Peut-être parce qu'il avait de mauvais souvenirs de l'armée, ou parce que la solitude précédente l'avait rendu à fleur de peau, Lucas sentit la panique se déverser en lui. Ce n'était plus une simple vibration dans le sol ; c'était l'annonce d'un danger ineffable, d'une serre qui allait se resserrer sur lui d'un instant à l'autre. Arriverait-il à contenir cette émotion maintenant que la secousse était finie, ou allait-il la laisser exploser ?

Non loin de lui, André continuait à se casser la tête sur la marche à suivre. Ses yeux virent très légèrement le sol bouger, et sitôt se sentit distinctement mal à l'aise, comme si son équilibre tout entier vacillait. Peut-être était-ce qu'il avait trop volé, trop réfléchi. Peut-être était-ce ce même effroi qui avait saisi Lucas, qui s'était retourné vers lui, et qui menaçait de l'envahir, lui aussi, pour lui rappeler qu'il était si fragile, et qu'il ne connaissait personne en qui il avait assez confiance pour venir le sauver si le pire advenait. En tout cas, ne serait-ce que pour tenter rationaliser ce malaise, il devait se poser. Arriverait-il à reprendre ses esprits, ou l'accumulation de désagréments et de dangers aurait-elle raison de sa réserve ?

De son côté, Langouste ne perçut absolument rien et continua tranquillement ce qu'elle était en train de faire. Cela étant, dans son insouciance, elle put certainement percevoir le malaise de ses camarades, mais aussi le mouvement d'arrêt qui avait figé le mouvement d'Hertz. Elle était visiblement la seule à n'avoir rien senti.