Rattrapage intensif de Travaux Pratiques

Lebland traversa la salle d'un pas vif, distribuant les sujets de TP aux élèves. Chouette, un TP, se disait-il. Oh noooon un TP, se disaient les élèves. Ça se voyait à leurs têtes. Il y en avait bien quelques uns qui étaient contents, mais la grande majorité ne rêvait déjà que d'une chose : rentrer. Ou bouffer, éventuellement.

« Un peu de calme, mes lapins ! »

"Mes lapins". Venant d'un prof de SVT, c'était particulièrement malsain comme surnom.

« Bon, tout le monde a un sujet ? Alors suivez les instructions à la lettre. En commençant pas la première : mettez vos blouses et allez chercher des gants sur mon bureau. Allez, on s'active, vous n'avez que 2h pour faire TOUT le TP. »

Il agrémenta sa dernière phrase d'un petit sourire amusé, signe que "faire TOUT le TP" n'était pas si facile que ça.

Ça c'est ledit sujet:

Al regarda quelques instants Lebland avec un air de dédain. Étrangement, parmi toutes les magnifiques sciences que compte le monde, comme celles de l'informatique, de l'ingénieur, de la physique ou encore des très prestigieuses Mathématiques (qui méritaient bien leur grand M), il a fallu qu'on invente la biologie. Et plus précisément, les travaux pratiques de Le Chat au milieu d'une salle qui n'avait même pas le mérite d'être propre. Des exercices sans calcul, des constatations à partir de photos qui en étaient si évidentes que cela n'avait aucun intérêt, des dissections dégoûtantes, des séances de jardinage improvisées, des microscopes qui ne fonctionnent jamais.

Bref, un plaisir en boîte qui se trouve dédoublé en présence de son éternel - ou du moins, dans l'espace de ce rêve si loin de la réalité - binôme. Sacha. Difficile de croire que ce mec-là n'était pas un taré de pokémon incapable de sortir sans son cosplay, contrairement à tout ce qu'il prétendait. Heureusement que tout cela était oublié et pardonné grâce à ses bons résultats dans toutes les matières. Surtout dans celle-là.

« Je vais voir le prof Chen pour nous deux. » Al ne put-il s'empêcher toutefois de glisser avant d'aller faire la queue derrière les autres élèves. Et d'en revenir à peine plus tard avec quatre gants. Le matheux avait déjà calculé qu'au moins 50% des gants seraient gaspillés - il espérait bien que ce soit les siens.

« Volontaire ? » demanda-t-il ensuite. Des fois que monsieur veuille prouver sa supériorité dans l'égorgement de plantes.

Ce prof est définitivement casse pied. Ce prof mourra un jour. Sans doute. Nous sommes tous mortels. Mais un jour, ce type crèvera tabassé par ses élèves. Ouais. Ou un élève en particulier. Ouais, par lui là, par exemple, au troisième rang, le brun cosplayé en Sacha de Pokemon. En plus il a son nom. Quelle blague de merde. Il changera de nom un jour. Quand il n'aura pas la flemme. Et puis. Ça lui ferait une raison en moins de rager.

Son binôme. Ah son binôme. Un bon vieux crevard comme il peut l'être. C'est en ça qu'il l'énerve aussi. Surtout qu'en SVT, il est totalement inutile. Fana de chiffre à la noix.

« Je vais voir le prof Chen pour nous deux.
- Fermes-là et vas-y. »

C'était pour être poli. En vrai, il l'a fait version soft. Mais vraiment, si non il aurait très bien pu partir dans une tirade d'insulte toutes plus grossières les unes que les autres. Mais il réserve ça pour la fin.

« Volontaire ?
- Certes, dit-il en prenant les gants, mais tu vas bosser aussi, crevard de matheux. Prépare les différents verres de montre pendant que j'égorge les plantes. (petite pause pendant qu'il met les gants) Ou je teste ma capacité à faire des coupes avec tes doigts. »

Puis il prend le rasoir, et regarde Al le plus sérieusement du monde, avant de lire attentivement le sujet et positionner les instruments et la plante comme inscrit dessus. Il trancha la première coupe, avec une minutie assez impressionnante lorsqu'on prend en compte son caractère de bourrin.

Lebland passait joyeusement entre les tables, observant de-ci, de-là, le travail des élèves. Parfois, il jetait un petit commentaire. « Attention Teissier, tu fais mal à ta plante, haha. »

Il arriva à la table du "binôme infernal", comme il se plaisait à les surnommer. Le matheux et le râleur.
Il jeta un vague coup d'oeil aux coupes de Sacha. Du bon travail, ça.

« Waaah, jolies coupes, Pikachu. Tu penses à quelqu'un en particulier quand tu fais ça, ou bien ? »

Puis il alla se placer derrière Al. Juste derrière. Et observa le moindre de ses gestes. Avec une attention toute particulière. Il adorait faire ça.

L'avantage de travailler avec Sacha était sa surprenante capacité à cracher toutes sortes d'insulte tout en travaillant. Sans trop se faire prier, il attrapa les six verres de montres en vérifiant rigoureusement que le précédent groupe n'était pas l'un de ces glandeurs de l'autre classe qui lavaient leur matériel avec le nez. Puis, en parlant de nez, Lebland ne tarda pas à ramener le sien avec une nouvelle pique à propos de Pokémon. Quelque part, c'était comme si on demandait sans arrêt au matheux des nouvelles de Jessy, son rapporteur, ou encore de Roxie. Si leur relation n'avait pas été basée sur le crachat mutuel, il en aurait compati discrètement, en fait.

Du coup.
« C'est plus probablement la CS Coupe. »
Dit-il innocemment avant de verser un peu d'eau de javel dans son verre à montre, l'air de rien, avant que Le Chat ne vienne se positionner derrière pour jouer les inspecteurs des travaux finis. Il retint un instant tout nouveau commentaire sur sa tâche - qu'il trouvait franchement chiante, surtout quand il se disait que la moitié du TP consisterait à poireauter devant les coupes en pleine beignade - et s'amusa à verser à la gouttelette près des quantités équivalentes. Fayotage en attendant que le professeur ne se décide à embêter Baudelaire, qui a lui seul formait le duo le plus catastrophique de la classe.

Je hais le lycée. Je hais la SVT. Je hais les TP. Je hais ce prof. Je hais le binôme d'à côté. BORDEL JE LES HAIS. Comment ils peuvent réussir ces putains de TPs avec un intellect aussi limité ? Y'a un truc. C'pas possible.
Et putaaaaain, ce TP est PIRE encore que les autres. Si ça continue comme ça, c'est mes DOIGTS que je vais couper, et pas la tige. En même temps, pour ce que ça change ... En tous les cas, je verrai rien au microscope.
Arrrrrgh, et le prof qui arrive. Génial. Bon, pour l'instant il se fout juste de la gueule des autres. Tant mieux. Sauf qu'après c'est mon tour.
Tsss, Monsieur J'aime-les-algorithmes essaie de faire de l'humour. Enfin, humour, c'est un bien grand mot, hein ...
Bon. Voyons un peu ces coupes ... Ouais, elles sont moches, quoi. En même temps, ils nous donnent des lames de rasoir émoussées. Sérieux quoi.

Sérieusement, il était obligé de venir les voir ? Il sait très bien qu'ils travaillent correctement, qu'il aille emmerder l'autre littéraire à la noix juste derrière !

« Waaah, jolies coupes, Pikachu. Tu penses à quelqu'un en particulier quand tu fais ça, ou bien ? »

Dernière coupe, il se tourna vers le prof rasoir à la main.

« Oui. Vous. Si vous pouviez débarrasser le plancher, vous gênez. »

Voilà, tout en politesse. Si ça ne tenait qu'à lui, il l'aurait insulté de connard et lui aurait probablement déjà planté le rasoir sur la main, histoire de voir s'il était possible de faire de jolies coupes avec ça.

« C'est plus probablement la CS Coupe. »

Et l'autre. Il planta le rasoir pile poil entre les deux bras de son binôme, proche du bord. C'est qu'il ne fallait pas qu'il casse un verre de montre

« C'est bon, vous avez terminé avec vos conneries ? Et si tu faisais ces putains de verres de montres plutôt que de glander hein ? Et vous, pour la deuxième fois, allez voir ailleurs, il y a d'autres personnes qui ont besoin de vous. Genre. Baudelaire. Alors dégagez. »

Heureusement que ce matheux est super minutieux dans ses dosages, si non il l'aurait claqué. Ouais. Définitivement.

Définitivement, Sacha savait viser avec un rasoir. Il avait raté sa vocation de lanceur de couteaux.

« C'est bon, vous avez terminé avec vos conneries ? Et si tu faisais ces putains de verres de montres plutôt que de glander hein ? Et vous, pour la deuxième fois, allez voir ailleurs, il y a d'autres personnes qui ont besoin de vous. Genre. Baudelaire. Alors dégagez. »
Que crois-tu que je sois en train de faire ? Actuellement, c'est toi qui me gêne. » répliqua-t-il sans aucunement défendre le pauvre professeur. Ni même le brave camarade de classe en pleine escarmouche avec les morceaux de plante.
Avec un feutre, il numérota les verres à montre par ordre de passage. Maintenant, il pouvait vraiment croiser les bras et attendre que le jureur de service y dépose et déplace les coupes. Trente minutes à fixer un chronomètre (qui figurait également dans le bac jusqu'à ce qu'Al le saisisse pour appuyer au départ), quel plaisir intense. Heureusement que leur binôme avait un spectacle intéressant à fixer juste à côté. Nul doute qu'il existait en ce monde quelque chose de bien pire que de se coltiner un Sacha violent et peu aimable.

« Je suggère de parier sur le nombre de fois où il va se tromper de verre à montre pendant que l'eau de javel fait son travail. Pour moi, c'est deux. »
C'est ça, des nombres. Il fallait bien rajouter du plaisir dans cette scène qui en manquait cruellement.

La réponse de Sacha ne tarda pas.

« Oui. Vous. Si vous pouviez débarrasser le plancher, vous gênez. »

Lebland s'autorisa un petit sourire. Si ce cher Pikachu était toujours d'aussi bonne humeur, il devait pousser au suicide bon nombre de gens.
Comme pour corroborer cette pensée, Sacha envoya sa lame de rasoir entre les deux bras d'Al.

« C'est bon, vous avez terminé avec vos conneries ? Et si tu faisais ces putains de verres de montres plutôt que de glander hein ? Et vous, pour la deuxième fois, allez voir ailleurs, il y a d'autres personnes qui ont besoin de vous. Genre. Baudelaire. Alors dégagez. »

Là, Lebland éclata franchement de rire.

« Je te colle Pikachu, gloussa-t-il. Ne serait-ce que pour passer plus de temps avec toi et tes incroyables capacités d'orateur. »

Sur ce, il se dirigea vers la paillasse d'à côté.

« Je te colle Pikachu. Ne serait-ce que pour passer plus de temps avec toi et tes incroyables capacités d'orateur. »

Il balança un regard lassé sur le prof qui partis enfin. Et lança à lui-même en chuchotant

« Si vous voulez hein. Chacun son lot de masochisme. »

Les liquides sont faits et les coupes trempent tranquillement dans leurs solutions. La première est déjà prête, celle dans l'eau, et il la dispose avec minutie sur la lame et dispose la lamelle sans une seule bulle d'air. Ce n'est pas parce que ce co-- prof l'énerve qu'il faut rater l'exercice.

« Je suggère de parier sur le nombre de fois où il va se tromper de verre à montre pendant que l'eau de javel fait son travail. Pour moi, c'est deux.
- Hmpf. Et encore tu es gentil. Je pense qu'en plus il va s'en mettre plein partout et va se demander pourquoi ses affaires sont toutes blanches. »

C'est le temps des Camino Vert et il réitère la procédure, avant de se tourner vers la paillasse d'à côté pour admirer le spectacle. Après tout, la prochaine est dans 7 minutes.

« Je suggère de parier sur le nombre de fois où il va se tromper de verre à montre pendant que l'eau de javel fait son travail. Pour moi, c'est deux.
- Hmpf. Et encore tu es gentil. Je pense qu'en plus il va s'en mettre plein partout et va se demander pourquoi ses affaires sont toutes blanches. »

CONNARDS.

« Tsk, vous rirez moins quand on sera en français, bande de losers. »

Hum ... ? Qu'est-ce que c'est qui dépasse de son sac ... ? Est-ce que par hasard ... OUI !
J'attends tranquillement que Le Chat s'éloigne un peu, puis je lance un sourire à mon cher voisin.

« Hé, le rouquin ! Elle est assurée ta machine ? »

Sur ce, je me jette sur son sac et me saisit de sa chère calculatrice, avant de reculer, hors de portée.
A moi de rire.

« Hmpf. Et encore tu es gentil. Je pense qu'en plus il va s'en mettre plein partout et va se demander pourquoi ses affaires sont toutes blanches.
- C'est probable.
- Tsk, vous rirez moins quand on sera en français, bande de losers. »

Et voilà Baudelaire qui se mettait en colère. Où étaient-ils passés, ses beaux vers en prose ? Tout le monde savait que le français était au moins aussi utile dans la vie que des tongs sous l'eau. Mais alors que le matheux s'apprêtait à exprimer cela par un rire parfaitement méchant, le poète maudit passa à l'attaque.

« Hé, le rouquin ! Elle est assurée ta machine ? »

Ta machine.. Oh, merde. Le temps de trouver, cet abruti d'Ervin s'était barré avec sa chère et tendre Roxie. L'enfoiré. Il allait crev… merde, le TP. Et le cours. Et Lebland qui pouvait débouler. Et Sacha qui risquait de lui planter le rasoir dans les cervicales s'il partait au secours de la pauvre calculatrice. Le mieux à faire contre le littéraire était de l'assassiner à distance.

« Surtout n'essaie pas de l'allumer, tu vas tomber dans les pommes en voyant les calculs. Ou plutôt dans les carminos. D'ailleurs, si t'amuses si bien, c'est que tu as fini ? Nous pouvons peut-être nous inspirer de tes lames déjà montées. »

Alors ramène-toi par ici, le poète à trois centimes, que je te fasse la peau tout en surveillant ce maudit chronomètre. Heureusement que la stupidité ne pouvait pas contaminer les objets. Al était bouillant comme une soupe trop cuite légèrement débordante de sa casserole, toutes les répliques du mondes étaient incapables de cacher à quel point il crevait de récupérer son bien par la force. Et ce, bien avant que l'eau acétique ne finisse de tremper.

« Tsk, vous rirez moins quand on sera en français, bande de losers
- Je te signal que je suis aussi bon en Français qu'en SVT, moi, loser. »

Et hop, un peu de vanterie, ça ne fait pas de mal.

« Hé, le rouquin ! Elle est assurée ta machine ? »

Et il lui pique sa précieuse. Rah il va devenir chiant. Et ne va pas bosser. Il est vraiment chiant ce Baudelaire.

« Surtout n'essaie pas de l'allumer, tu vas tomber dans les pommes en voyant les calculs. Ou plutôt dans les carminos. D'ailleurs, si t'amuses si bien, c'est que tu as fini ? Nous pouvons peut-être nous inspirer de tes lames déjà montées.
- Quelle idée aussi de laisser ça traîner. Et tu es gentil mais je ne préfère pas m'inspirer de son bordel monstre, t'as vu sa paillasse ? Je suis certain que ses trucs seront plein de bulle d'air et il verra rien au microscope et va encore cracher sur l'appareil alors que c'est lui qui a merdé. »

Les yeux toujours sur les verres de montres, se fichant totalement de l'humeur de son binôme. Et puis. Il cogna Al sur la tête

« Eh. Combien de temps s'est passé ? »

Lebland jeta un coup d’œil au fond de la classe. Hum. Évidemment, ils n'étaient pas fichus de rester calmes plus de trois minutes. Il se rapprocha.

« Silence par ici ! Vous vous croyez déjà en récré ou quoi ? »

Il jeta un coup d'oeil à l'avancement de chaque groupe. Du côté de Pikachu et son binôme, rien à dire. En revanche ...

« Dis voir, Schwarz, une tornade est passée sur ta paillasse ou quoi ? Dépêche-toi un peu, ça fait déjà une demi-heure et tu as à peine commencé. Et applique-toi, tes coupes sont pas assez fines. Tu verras rien là. »

Puis, tout en s'éloignant :

« Si je vous reprends encore à foutre le boxon, je vous colle avec Pikachu. »

« Surtout n'essaie pas de l'allumer, tu vas tomber dans les pommes en voyant les calculs. Ou plutôt dans les carminos. D'ailleurs, si t'amuses si bien, c'est que tu as fini ? Nous pouvons peut-être nous inspirer de tes lames déjà montées. »

... Sale type. Tu vas voir ce que je vais en faire de ta calculette à la noix.

« Quelle idée aussi de laisser ça traîner. Et tu es gentil mais je ne préfère pas m'inspirer de son bordel monstre, t'as vu sa paillasse ? Je suis certain que ses trucs seront plein de bulle d'air et il verra rien au microscope et va encore cracher sur l'appareil alors que c'est lui qui a merdé. »

MAIS BORDEL. LAISSEZ MON BORDEL TRANQUILLE. J'EN PERDS MON VOCABULAIRE TIENS.

« Silence par ici ! Vous vous croyez déjà en récré ou quoi ? »

... Aïe. Je l'avais pas vu arriver.

« Dis voir, Schwarz, une tornade est passée sur ta paillasse ou quoi ? Dépêche-toi un peu, ça fait déjà une demi-heure et tu as à peine commencé. Et applique-toi, tes coupes sont pas assez fines. Tu verras rien là. »

Je grommelle. Décidément, tout le monde est ligué contre moi. D'abord, je suis tout seul. Ce connard de prof de mes deux pourrait AU MOINS prendre ça en considération. Le roux stupide d'à côté ne ferait pas mieux que moi s'il n'avait pas son cher Pokémon pour lui filer un coup de main.

« Si je vous reprends encore à foutre le boxon, je vous colle avec Pikachu. »

... Oh non. LE CAUCHEMAR. Pas question que ça m'arrive. J'y survivrais pas. Pikachu, Le Chat et le fana de maths, en TÊTE-À-TÊTE. Arrrrrrrgh.
... Mais bon. Pas question que je me laisse faire pour autant, hein.

« Heh. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de cette calculatrice, moi ? Une cale pour ma table en français, peut-être ? Elle est bancale. »

« Quelle idée aussi de laisser ça traîner. Et tu es gentil mais je ne préfère pas m'inspirer de son bordel monstre, t'as vu sa paillasse ? Je suis certain que ses trucs seront plein de bulle d'air et il verra rien au microscope et va encore cracher sur l'appareil alors que c'est lui qui a merdé.
- C'était dans l'hypothèse impossible où il avait fini. Et, accessoirement, elle ne traînait pas.. »

Alors qu'il allait de nouveau de nouveau cracher sur ce littéraire à cinq centimes, Al sentit que son cher binome commençait à s'impatienter. Toujours agréable de travailler avec ce type qui vous frappe pour un oui ou pour un non.
« Eh. Combien de temps s'est passé ?
- Quatre minutes et trente cinq secondes. Trente six. »
Il lui désigna le chronomètre qu'il n'avait pour l'instant pas oublié. Ce fut le moment que choisit Lebland pour intervenir et remettre ce brave Ervin à sa place. Il fallait dire que ce n'était pas volé, au vu de l'état lamentable de la paillasse voisine, et le matheux en ressortit avec un petit sourire de satisfaction. Sauf que ce professeur faisait toujours les choses à moitié ; il aurait pu au moins remarquer que ce brigand avait pris en otage la douce Roxie. Surtout que l'autre n'avait pas l'air prêt à la lui rendre.

« Heh. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de cette calculatrice, moi ? Une cale pour ma table en français, peut-être ? Elle est bancale.
- Ta table, répondit-il d'une voix sèche mais peu élevée histoire de ne pas rameuter le prof, tu risques fort de la manger au prochain cours. Mais si tu le souhaites, nous pourrons aussi y rajouter une salade aux fines feuilles de Fleurs du Mal. Avec, en dessert, le zéro que tu auras pour ce TP si tu poursuis dans cette voie, ou ton bulletin de colle. Le choix te revient, Baudelaire. »

Enfin, autrement dit, cela aurait pu être : "Pitié, rends-la moi, j'en ai besoin pour le contrôle de tout à l'heure. En plus j'ai tous mes jeux dessus." Mais Al n'était pas dans une situation de mort imminente où il perdait sa fierté de matheux prétentieux. Et était sérieusement remonté, pour le coup, bien qu'il suivit sa réplique d'une énième vérification de l'état de leurs verres à montre. Après avoir confirmé qu'on pouvait enlever l'eau acétique, il jeta un nouveau regard de fureur à Ervin d'ici à ce que l'eau de javel prenne. Cinq à dix minutes restantes avant de passer à l'étape des lamelles et du microscope. Il fallait espérer que ce serait assez pour faire abdiquer ce crevard.

S’il y avait bien UNE SEULE chose qu’il appréciait chez son binôme, c’était bien sa précision dès qu’il s’agissait de chiffre. C’est pour cela qu’il n’a jamais vraiment cherché à être seul lors des TP, si non il aurait dix fois mieux préféré faire tout, tout seul. Ce qui est un peu le cas en réalité, mais là n’est pas la question.

Oh. Le prof fait son rôle de prof. Un miracle. Mais ça n’empêche pas les deux abrutis à se cogner dessus verbalement. Et oh pitié pas avec eux. Enfin. La colle il la ferait bien tout seul. Même sans le prof. Ouais. Ou il va y avoir un meurtre. C’est dommage parce que c’est salissant et ça ramène un paquet d’emmerdes.

« Vos gueules. Baudelaire, c’est pas ta table qui est bancale, c’est ta tête. Redresses-toi s’pèce de tortue et les coupes se feront comme par magie. Ou pas. Mais fermez-là sérieusement, j’en ai marre de vos jérémiades. »

« Ta table, tu risques fort de la manger au prochain cours. Mais si tu le souhaites, nous pourrons aussi y rajouter une salade aux fines feuilles de Fleurs du Mal. Avec, en dessert, le zéro que tu auras pour ce TP si tu poursuis dans cette voie, ou ton bulletin de colle. Le choix te revient, Baudelaire. »

Haha. Qu'il est mignon.

« Vos gueules. Baudelaire, c’est pas ta table qui est bancale, c’est ta tête. Redresses-toi s’pèce de tortue et les coupes se feront comme par magie. Ou pas. Mais fermez-là sérieusement, j’en ai marre de vos jérémiades. »

Je ricane.

« Désolé, mais je ne parle pas aux otakus. Pas assez de vocabulaire pour une conversation digne de ce nom. En revanche, si tu veux quelqu'un de ton niveau, essaie plutôt chez ton voisin, le rouquin. En tant que matheux digne de ce nom, il pourrait même compter le nombre de mots qu'il connaît. Oups, pardon, c'est vrai que tout le monde sait compter jusqu'à 20. Quoique, sans sa calculatrice, pas sûr qu'il en soit encore capable. »

Et Sacha qui se montrait toujours aussi compatissant. Al se retint de dire que s'il sacrifiait trois secondes de son précieux temps pour l'aider à récupérer Roxie, il n'y aurait plus le moindre problème et le TP serait bouclé bien avant la fin du temps imparti. On ne surnommait pas Ervin le poète uniquement parce qu'il aimait le français pour une raison obscure ; c'était aussi parce qu'il l'ouvrait de plus en plus et partait dans de longues envolées lyriques dès lors qu'on le piquait un peu. Or, le matheux n'aurait jamais eu l'idée de donner du carburant au moteur… sauf si l'enjeu était vital. Justement.

Donc, passé l'interminable monologue de ce cher Baudelaire en pleine tentative d'insultes mathématiques, il se pinça l'arrête du nez. Pour le coup, c'était bien un terrain où il ne fallait pas tatiller le fanatique de nombres. Surtout pas. Il n'y avait à ses yeux rien de plus énervant qu'un crétin de littéraire balançant des propositions erronées à tout va - oh, ça, oui, la rage de la démonstration était en train d'envahir le rouquin plus vite que l'armée allemande de 1940 en France…

« Je ne sais pas lequel de vous deux est le plus masochiste.. » grinça-t-il à mi-ton, avant de se rajouter mentalement « Certainement moi, pour être assis entre le grognard de service habillé en dresseur de pokémon et le poète chiant qui crie pour être frappé.. » La marge d'erreur était négligeable. En personne qui voulait garder la tête froide et régler les conflits par la diplomatie (qui a dit poule mouillée ?), il considéra ses possibilités en excluant d'office celle de passer pour une ordure en frappant son ennemi - c'était mal de s'en prendre à plus faible que soi en présence du professeur.

« Bon. Sauf si tu désires que Mr Lebland t'explique pourquoi les êtres dénués de logique (et les littéraires, voulut-il préciser) n'ont pas leur place dans l'évolution, ou encore le sens de la propriété privée, pose Roxie bien gentiment. Promis, je t'expliquerai pourquoi il y a plus de vingt mots différents dans ce que je viens de dire, comment compter à partir de 21 et de quelle manière on peut retenir sa langue. Tu as vingt secondes, ça ira ou je te prête mes doigts ? »

Même s'il avait jeté une nouvelle bûche dans le feu, c'était pour la bonne cause, et il pourrait librement aller se plaindre en toute diplomatie auprès du prof une fois cet ultimatum atteint. Cette fois, il posa le chronomètre devant lui et surveilla l'écoulement des secondes.

Il regarda Ervin avec dépit. Waw. C'est blessant… Non, mais il est au courant que Sacha est le 2e de la classe en Français ? Égalisant parfois monsieur le littéraire.

« Je ne sais pas lequel de vous deux est le plus masochiste...
- Toi. »

Puis le rouquin part dans une tirade interminable. C'est bien, maintenant on sait qu'il a plus de 20 mots de vocabulaire, c'est cool. Mais ça va juste faire rire, rien de plus. Sacha soupira bruyamment.

« Toi, tu surveilles le temps. »

Quitte à avoir une seconde heure de colle, il en a rien à faire, mais il veut bosser, bordel. Alors il alla voir Ervin pendant que le prof s'occupe d'un groupe et leur tourne donc le dos, lui foutu une baffe derrière le crâne avant qu'il ait eu le temps de protester, en profita pour récupérer la calculette et retourna sur sa paillasse. Il garda l'objet dans la poche.

« Tu bosses et tu récupères ta calculette, c'est clair ? »

Obligé de bouger son propre derrière. Sérieusement. Ils le gavent.

« Je ne sais pas lequel de vous deux est le plus masochiste...
- Toi.
- Oui, toi.»

C'est bien, au moins pour une fois, on est d'accord.

« Bon. Sauf si tu désires que Mr Lebland t'explique pourquoi les êtres dénués de logique n'ont pas leur place dans l'évolution, ou encore le sens de la propriété privée, pose Roxie bien gentiment. Promis, je t'expliquerai pourquoi il y a plus de vingt mots différents dans ce que je viens de dire, comment compter à partir de 21 et de quelle manière on peut retenir sa langue. Tu as vingt secondes, ça ira ou je te prête mes doigts ? »

« Haha tu- AÏEUH ! »

Je rêve ou ce crétin d'otaku vient de me frapp- LA CALCULETTE BORDEL !

« Tu bosses et tu récupères ta calculette, c'est clair ? »

« Quoi ? Mais t'y connais rien en chantage ou quoi ? Tu pouvais lui demander teeeeeeellement d'autres trucs ! Genre, se taire pour le reste des cours de la journée, voire de la semaine, ou encore aller t'acheter des Pokéballs avec son propre argent de poche ! Tu descends encore dans mon estime, Pikachu. Prend une pelle, faudra commencer à creuser, quand t'auras touché le fond. ça va pas tarder, c'est juste une question de secondes. »

Cette contemplation béate de l'écran du chronomètre ne dura pas. Sacha, qui évidemment en avait eu marre, s'était levé pour sauver de lui-même la précieuse Roxie. Tout cela sans que jamais le matheux ne quitte sa propre chaise. Jackpot - comme quoi la diplomatie est toujours payante. Baudelaire s'en était d'ailleurs pris une sacrée derrière la tête au final, il ne l'avait pas volée.

Sauf que, alors qu'il s'apprêtait à festoyer, serrer dans ses bras sa tendre et douce retrouvée, Sacha ne semble pas disposé à accéder à sa requête.

« Tu bosses et tu récupères ta calculette, c'est clair ?
- Oui, maman... De base, tu n'es pas censé me demander de contrepartie pour ce que j'ai déjà, Pikachu. Je travaillerais mieux si j'avais l'esprit tranquille et, de plus, j'avais aussi prévu de travailler avant que Baudelaire ne vienne passer son ennui. »

Avant qu'il ait pu argumenter davantage sur la nécessité de revoir Roxie, l'autre littéraire s'était remis à parler. Bla, bla, bla, Ervin ne savait absolument pas se taire, quelle que soit la situation, comme s'il avait peur de ne pas recevoir davantage de claques dans la figure. Sauf que connaissant Sacha, il ne serait pas content tant qu'il n'aurait pas 20 à son TP, et il était capable de cacher la calculatrice au milieu de tous ses pokéballs. Donc, une seule solution, qui était devenue parfaitement envisageable depuis que ce cher Baudelaire était devenu inintéressant. L'ignorer. De toute façon, parler avec un nul en maths est nocif.

« On peut enlever l'eau de javel, et passer à la suite.. »

Stratégie pour ne pas quitter son siège, second volet : aller chercher des lamelles au bureau, juste à côté des profs. Le moyen le plus évident consistant à ne pas se proposer, en attendant que Sacha soit volontaire de lui-même - facile, Pikachu faisait tout tout seul - tandis qu'Al fait en sorte qu'Ervin ne foute pas le bordel. C'était facile, parce qu'il fallait avouer que le lettré et le calculeur avaient un gros point commun : pouvoir se lancer dans des joutes verbales infertiles pendant plusieurs heures. Juste pour le plaisir de se détester et de penser que l'autre est un crétin.

Ce type tend le bâton pour se faire battre. Sérieusement.

« Je me servirais de cette pelle pour autre chose, vois-tu. »

Regard menaçant puis il tourna la tête vers ce qu'il l'intéresse depuis le début, ce foutu TP. De toute façon le littéraire finira à moitié mort sur un trottoir à la fin de la journée.

« Oui, maman... De base, tu n'es pas censé me demander de contrepartie pour ce que j'ai déjà, Pikachu. Je travaillerais mieux si j'avais l'esprit tranquille et, de plus, j'avais aussi prévu de travailler avant que Baudelaire ne vienne passer son ennui. »

Ok, lui aussi finira à moitié mort sur un trottoir.

« On peut enlever l'eau de javel, et passer à la suite... »

Il tendit la main vers le verre de montre et. Les lames. Regard meurtrier envers son voisin, qu'il poussa de son tabouret.

« He. Tu crois vraiment que je vais TOUT faire ? Bouge ton cul d'inutile et va me chercher les lames et lamelles. Et dépêches-toi. »

Pendant ce temps-là, il rince les coupes à l'eau distillé. Non mais oh, il faut pas se foutre de la gueule du monde non plus. Encore un peu et ce sera pas qu'à moitié mort qu'on le retrouvera.

« Je me servirais de cette pelle pour autre chose, vois-tu. »

Et après que Pikachu ait viré son crétin de binôme, je me tourne vers lui, tout sourire.

« Ah oui ... ? Tu connais beacoup d'autres choses qu'on peut faire avec une pelle ? Dis-moi tout, je suis tout ouïe. Ou plutôt laisse-moi deviner. Tu fais partie d'un club SM, c'est ça ? Ne t'inquiète pas, je ne dirai rien à personne. Enfin, pas pendant trois secondes, disons. »

Pas très fin, mais il faut bien se mettre au niveau de ses adversaires. Heh.

Sauf que, eh bien, Sacha n'avait ni l'intention de restituer la calculatrice, ni le désir d'aller chercher les lames. Comme s'il avait déjà oublié qui était allé chercher les gants tout à l'heure, au risque de s'approcher trop près du lavabo et d'être éclaboussé, au péril de sa propre vie ! (à quelques exagérations près) Heureusement pour lui qu'Al pardonnait facilement, pour ne pas dire qu'il avait le courage d'une gamine de CE2, et qu'il se retint de répondre encore une fois. Pas spécialement envie de finir devant l'administration à cause d'un stupide TP de biologie, ou même d'imaginer rester en tête à tête avec Lebland tout un après-midi ; plutôt écraser tous ses programmes et les recommencer un par un.

Tandis qu'il s'éloignait avec un « Je ne voudrais pas être à la place de tes pokémon », il capta vaguement les paroles d'Ervin. À qui il eut très franchement envie de répondre qu'il ne connaissait pas très bien les membres de son propre club, parce qu'au vu du caractère il ne pouvait que l'avoir fondé. Mais bon. Baudelaire était un simple littéraire diminué qui commençait sérieusement à le gaver, Sacha s'amuserait tout seul. Comme si l'arrière de la salle ne s'était pas transformé en champ de bataille, et dès qu'il fut assuré que Lebland ne traînait pas dans le coin, Al s'empara du matériel nécessaire sans grand entrain, jeta un coup d'oeil aux binômes du premier rang afin de jauger leur avancée et revint bien gentiment auprès de Jack l'éventreur. Auquel il tendit la main qui ne transportait pas les lames, histoire de récupérer son précieux tant qu'il avait une monnaie d'échange. Fallait pas déconner, il détestait qu'on lui pique les affaires et qu'on le bouscule pour faire le sale boulot juste après, et si Sacha n'abdiquait pas, Baudelaire serait sûrement ravi de réceptionner.