Meet Silver

Description

Avant toute chose, parlons un peu de Silver en termes généraux. En premier lieu, précisons qu'il s'agit d'une métisse eurasienne de 28 ans, haute d'un mètre soixante quinze et pesant soixante-quatre kilos. Elle est née à Kyōto d'un père japonais ingénieur informaticien et d'une mère française interprète, et avait un frère jumeau – Akira. Pourquoi cet usage de l'imparfait me direz-vous? Tout simplement parce qu'elle a perdu sa famille à l'âge de dix-sept ans, par l'œuvre des balles d'un gang yakuza local. Pour faire très simple, disons que la suite l'a conduite à se frotter à la mafia russe pendant de longues années, et que jusqu'à son arrivée dans l'Esquisse elle n'était ni plus ni moins qu'une tueuse à gages... vendant ses services au plus offrant.
Du fait de ses activités, il s'agit donc d'un personnage rompu au maniement aussi bien des armes blanches qu'à feu, ainsi que du combat à mains nues. On pourra d'ailleurs remarquer les nombreuses cicatrices qu'elle a sur le corps, ainsi qu'un détail pouvant surprendre au premier abord; si son œil droit est d'un vert profond, son voisin est argenté. La faute à un règlement de comptes avec des membre d'une Bratva, ayant résulté dans le remplacement dudit œil par une prothèse bionique fabriquée par un thaïlandais quelque peu véreux (mais bon, une prise de taijutsu et un pif cassé plus tard il a pu comprendre qu'il vaut mieux pas essayer de la faire à l'envers à notre Silver).
Sa tenue usuelle consiste en une veste en cuir blanche courte et ample, portée par dessus un T-shirt plus ou moins vintage (de préférence comportant du rouge ou du orange) et un jean légèrement délavé; et complété par une paire de Reebok Alien Stomper, voire (si elle en retrouve), une paire de Ray-Ban à verres miroir.
Enfin, si l'on s'attarde sur sa personnalité, on pourrait vite la qualifier de brisée, et ce même si elle refusera de le reconnaître. Il s'agit en fait de quelqu'un qui a beaucoup souffert à cause de gens qui ont profité d'elle, le pire étant quand il s'agissait de personnes en qui elle faisait confiance. De ce fait elle garde une certaine méfiance envers ceux qu'elle ne connaît pas, même si ça ne l'empêche de parfois avoir un bon feeling envers certains et d'être toujours prête à aider/défendre ceux qu'elle considère comme des amis. Bien qu'elle se soit fait une spécialité de balancer des vannes sarcastiques à tout bout de champ, elle peut apparaître triste, froide ou aigrie; par ailleurs elle semble avoir une bonne capacité d'analyse, quoiqu'elle ait une tendance à tirer des conclusions trop hâtives ou à se laisser aller à un pessimisme pas forcément constructif. En résumé... beaucoup de contradictions avec lesquelles elle a appris à vivre.

A présent... place à l'histoire...


Sa tête était prête à exploser. Elle tenta une première fois d'ouvrir les yeux, mais la lumière environnante était bien trop forte pour venir à bout d'une telle entreprise. Ainsi resta-t-elle allongée sur le ventre quelques minutes – heures? – de plus, ses narines titillées de façon passablement énervante par ce qui semblait être un brin d'herbe. 'Tu commences à me les casser, toi.' , pensa-t-elle. 'Si seulement j'avais pas ce foutu mal de crâne.'

Il lui fallut un effort quasi surhumain pour finalement entrouvrir ses paupières, mais au moins le plus dur étais fait. Car à l'instant où elle vit la couleur du dissident brin, ses deux globes oculaires s'arrondirent comme des assiettes. Rouge. Alors que la douleur lancinante lui traversa l'occiput de part en part, elle ferma de nouveaux les yeux, cette fois avec une grimace horrible. 'Nom de dieu...'

Pourtant, contrairement à toutes ses espérances, les rouvrir ne dissipa pas l'hallucination. L'herbe qui l'entourait était rouge, sans qu'elle ne puisse décider si la couleur tirait plutôt vers le corail ou la brique. Elle se massa le front lentement, se disant qu'il s'agissait sûrement d'un rêve, qu'elle allait se réveiller... un petite minute, se réveiller, oui, mais où ça?

Elle eut un instant d'hésitation. 'Où est-ce que t'étais, avant de te réveiller là?' Elle racla les tréfonds de sa mémoire, mais ceux-ci demeurèrent désespérément vides. 'Bon, au moins tu sais encore qui tu es...' Sa pensée se coupa net. La vérité était que non. Elle se souvenait de certains visages, mais ceux-ci semblait flous et distordus – le sien compris. 'M'enfin c'est ridicule... tu doit bien connaître ton nom quand même...' Après un douloureux instant de réflexion, quelques vagues souvenirs affluèrent timidement à la surface de son esprit embrouillé.

Silver. Elle ne savait pas d'où provenait un nom aussi étrange, mais elle était quasiment certaine qu'on l'avait déjà appelée comme ça. Elle se souvenait aussi à peu près de son âge – vingt-sept ou vingt-huit ans, mais elle n'en était pas totalement sûre. Quant à savoir d'où elle venait... nichto. Elle buta sur ce dernier mot. 'Du russe... donc, techniquement, je parle russe.'

Consternée par l'évidence que ces dernières réflexions devraient représenter, elle s'affala sur le dos... et resta médusée par ce qu'elle découvrit. Le ciel... il était rose. Rose. Mais pas le rose qu'il pourrait avoir lors d'un soleil couchant, non. Un rose pétant, presque digne des néons d'une boîte de nuit des années 1980.

Instinctivement, elle se pinça, plantant ses ongles un peu en dessous de son cou. La douleur était bien moindre que celle qui rongeait son crâne, mais était un signe très clair. Elle était bel et bien éveillée. Précaution assez utile, finalement. Car lorsqu'elle entendit un étrange bruit se rapprocher d'elle, bien qu'elle se disait qu'elle avait déjà eu son compte d'absurdités pour la journée, la seule vue de la source du son lui prouva à quel point elle avait tort. Il s'agissait... d'un mochi géant.

Prise de panique à la vue de la grosse boule de riz sauteuse, elle bondit sur ses pieds. Bien qu'elle n'aurait jamais imaginé de chose plus inoffensive qu'un mochi, elle avait un mauvais pressentiment. La chose continuait à se rapprocher d'elle, et sa taille combinée à sa texture gluante en faisait certainement le meilleur moyen de finir étouffée, écrasée... ou les deux.

Ainsi, elle détala à vive allure. Elle n'avait aucune idée d'où elle allait, ni s'il y avait encore d'autres aberrations du même genre qui rôdaient dans les parages, mais au moins la chose était bien trop lente pour la rattraper. Elle ne s'arrêta que quand elle tomba à terre, à bout de souffle, maudissant sa couardise de lui avoir fait dépenser toutes ses ressources aussi vite alors qu'elle était tout, sauf en lieu sûr.

Pour passer le temps alors qu'elle reprenait son souffle, elle fouilla ses poches. Elle y découvrit un smartphone, une paire d'écouteurs et ce qu'elle identifia comme un couteau à cran d'arrêt à lame de céramique. Ce dernier objet était utile, elle le rangea donc avec soin. Quant au téléphone, si elle se souvint du schéma à tracer pour le déverrouiller, une autre mauvaise surprise l'y attendait. Tous les caractères avaient été remplacés par des symboles aléatoires, quelle que soit la langue. Impossible donc d'y récupérer des informations, et ce d'autant qu'il ne comportait aucune photo.

Pourtant, il y avait bien quelque chose qui était resté intact dans la mémoire; la musique. Bien que tous les titres soient illisibles, les fichiers étaient restés tels quels et elle se sentait capable de retrouver à quoi ils correspondaient dans les loques qui lui restaient en guise de souvenirs. Elle en lança un alors au hasard, enfonçant les écouteurs dans ses oreilles alors qu'elle reprit sa route. Alors que la plupart était des titres plus ou moins liés aux années 1980, il s'agissait d'un morceau de rock sorti deux décennies auparavant – Surf Beat. Etrangement, celui-ci lui faisait beaucoup d'effet, comme s'il était associé à un souvenir perdu.

Elle poussa un léger soupir, et se concentra sur sa marche. Devant elle, la silhouette d'un bâtiment imposant se dessinait... avec un peu de chance elle y trouverait un abri à peu près sûr.