[Fin du jour 15, salle de réunion]Les roux de l'infortune (Avec Al)
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Ven 19 Aoû - 15:01
Cette fois j'étais dedans jusqu'au cou. J'étais pas descendue jusque là en une seule fois, non. Graduellement. Petit à petit, les emmerdes avaient gagné en intensité et en ampleur, jusqu'au moment où, bien sûr, tout ce paquet de saloperies retombe d'un coup, parce que, trop lourd. Et comme par hasard, j'étais dessous. Parce que je suis toujours dessous.
En y songeant, c'est arrivé assez bêtement. Quelques heures avant, je faisais le planton dans une cuisine, essayant d'imaginer le chef se mettant le feu. J'irais pas jusqu'à dire que je voulais vraiment sa mort, mais… j'imagine que l'envie de faire passer quelqu'un à l'état de macchabée devient naturelle à partir d'un moment. Doit y avoir un seuil, quelque chose : un ratio entre le bon sens et la connerie. Quand la balance penche trop d'un côté, soit on devient insupportable, soit on donne envie à ceux autour de nous de se jeter des monts McDonnell. Elle était de la deuxième famille.
Mais finalement personne n'est mort ; c'est tant mieux, je suppose. Quoique, eh, ça aurait peut-être forcé quelqu'un à nettoyer ! Obligé les limaces du coin à se lever et à faire quelque chose de leurs vies ! Mais non. Il faut croire que je suis trop gentille, ou trop bête, pour oser faire ce genre de chose. Pour le meilleur ou pour le pire, donc, je n'ai finalement tué personne. D'un autre côté, je suis pas morte non plus. Ce qui représente un bon départ.
Mais les bons départs peuvent aussi s'achever au moment où le coureur se prend les pieds dans un coin du tapis et s'étale, l'air aussi con qu'une mouche sur un capot qui vient de se rendre compte qu'on est début décembre. Devinez quoi, le coureur, c'est moi. Sauf que c'était pas un tapis. C'était pire.
Jusque là, l'univers avait adopté une posture passive-agressive : « A. J. Walker ? Oubliez-la, elle en vaut pas la peine ». Le pire qui me soit arrivé, c'est qu'une voiture me tombe dessus. J'étais dedans à l'origine, alors… forcément, ça m'a pas réussi. J'ai quand même eu du bol de m'en sortir avec une jambe cassée. Ensuite c'est resté calme. Il y a eu cette histoire avec les organisateurs, enfin, « logisticiens » : une poignée d'abrutis résolus à sauver l'univers, rien que ça ! Jusque là, ça a pas franchement réussi. C'est pas faute d'avoir essayé : la plupart étaient motivés. Ils le sont toujours, j'imagine. Moi j'étais juste là parce qu'on étais planqués.
Parmi eux, il y avait une gamine -enfin, un type dans une gamine, Imogen-, qui m'avait parlé du fait que le grand type là-haut, l'Esquisse, ou qui que ce soit se fichait de si j'étais là, et que de toute manière j'étais chanceuse d'être encore moi. Elle -il ?- l'avait pas dit comme ça, mais c'est ça que j'ai compris après y avoir réfléchi. Et j'y ai réfléchi trop tard, comme d'habitude.
J'aurais pas dû m'énerver auprès des autres. J'aurais pas dû quitter le bâtiment. C'est tout moi, ça : je fais des conneries. Et forcément, j'ai voulu rentrer au manoir, pour trouver un peu de calme. A la bonne heure ! J'avais bien dit que ce serait stupide : devinez quoi. Je me suis perdue. Parce que personne n'est arrivé là où il voulait aller simplement en matant ses pieds et en leur disant d'avancer.
Et donc, j'étais dedans jusqu'au cou. L'Esquisse avait finalement décidé que je valais la peine qu'on m'achève. Ou que je n'avais pas de raison d'être, je le saurai jamais.
Il y avait une fontaine : un truc de franchement mauvais goût, avec une vieille statue au centre : le genre de chose qu'on trouve dans les vieux numéros d'Astounding Stories. Y avait personne autour, et pourtant… l'endroit entier était vivant. Je suis pas vraiment claire, mais je sais vraiment pas comment le dire autrement. Je savais qu'il y avait des choses, mais ça… personne ne m'avait parlé de ça. Personne ne m'avait dit comment tout fonctionnait. Je suis sûr que certains, là-bas, au manoir, à la base, peu importe où, savaient. Ils m'auraient dit de m'arrêter. De ne pas avancer. Mais ils n'étaient pas là, et je savais pas trop quoi faire, alors évidemment, j'ai balancé ma vie en l'air.
Enfin, non. Je n'ai pas foutu ma vie en l'air : j'aurai juste essayé de le faire. J'avais encore jamais fait dans les tentatives de suicides, et je veux plus jamais recommencer. Parce que ça m'a fait mal. Très mal. Plus que la chute en voiture, plus que la fois où je m'étais ouvert le front en faisant du vélo. J'avais neuf ans. Là j'en avais vingt-trois, et pourtant j'ai pleuré comme si j'en avais deux. Merde.
Je ne sais pas pourquoi tout ça m'est arrivé ; c'est peut-être la faute du Monde, c'est peut-être ma faute, sans doute un peu des deux et beaucoup d'idiotie de ma part. Un genre de grand baptême. Imogen disait vrai, ceux en blouse disaient vrai : Et j'ai pas écouté. Mais pourquoi fallait-il que je n'écoute jamais ?
Mais j'ai fini par ressortir. Je ne sais pas combien de temps je suis restée prostrée par terre, la tête dans la poussière. Mais j'ai fini par me relever ; ça m'a pris longtemps, je crois bien. L'exploit. Et j'ai repris ma route en sens inverse, en priant pour ne pas m'effondrer en chemin. Je ne sais pas non plus à quel moment je me suis aperçue que j'avais plus aucun équilibre sur mes jambes. Trop longues. Je me suis arrêtée, je me suis regardée. Et cette fois j'étais vraiment, mais vraiment dans la merde jusqu'au cou.
Je suis rentrée en clopinant dans la base, avec deux envies : m'enterrer quelque part dans le jardin, et m'excuser auprès de quelqu'un. Puis je me suis dit que m'enterrer m'aiderait pas à trouver des excuses, alors je suis monté jusqu'à la salle de réunion. Elle y était pas, mais y avait quelqu'un dedans. J'ai failli faire demi-tour, et puis je me suis dit « et merde, après tout pourquoi pas ? ». Je suis rentrée, je me suis posée à côté d'Al, et j'ai dit, avec une voix qu'était plus vraiment celle que j'avais eu avant :
« Salut, toi. »
Et maintenant que j'y pense, c'était assez bête aussi, comme manière d’amorcer le dialogue.
En y songeant, c'est arrivé assez bêtement. Quelques heures avant, je faisais le planton dans une cuisine, essayant d'imaginer le chef se mettant le feu. J'irais pas jusqu'à dire que je voulais vraiment sa mort, mais… j'imagine que l'envie de faire passer quelqu'un à l'état de macchabée devient naturelle à partir d'un moment. Doit y avoir un seuil, quelque chose : un ratio entre le bon sens et la connerie. Quand la balance penche trop d'un côté, soit on devient insupportable, soit on donne envie à ceux autour de nous de se jeter des monts McDonnell. Elle était de la deuxième famille.
Mais finalement personne n'est mort ; c'est tant mieux, je suppose. Quoique, eh, ça aurait peut-être forcé quelqu'un à nettoyer ! Obligé les limaces du coin à se lever et à faire quelque chose de leurs vies ! Mais non. Il faut croire que je suis trop gentille, ou trop bête, pour oser faire ce genre de chose. Pour le meilleur ou pour le pire, donc, je n'ai finalement tué personne. D'un autre côté, je suis pas morte non plus. Ce qui représente un bon départ.
Mais les bons départs peuvent aussi s'achever au moment où le coureur se prend les pieds dans un coin du tapis et s'étale, l'air aussi con qu'une mouche sur un capot qui vient de se rendre compte qu'on est début décembre. Devinez quoi, le coureur, c'est moi. Sauf que c'était pas un tapis. C'était pire.
Jusque là, l'univers avait adopté une posture passive-agressive : « A. J. Walker ? Oubliez-la, elle en vaut pas la peine ». Le pire qui me soit arrivé, c'est qu'une voiture me tombe dessus. J'étais dedans à l'origine, alors… forcément, ça m'a pas réussi. J'ai quand même eu du bol de m'en sortir avec une jambe cassée. Ensuite c'est resté calme. Il y a eu cette histoire avec les organisateurs, enfin, « logisticiens » : une poignée d'abrutis résolus à sauver l'univers, rien que ça ! Jusque là, ça a pas franchement réussi. C'est pas faute d'avoir essayé : la plupart étaient motivés. Ils le sont toujours, j'imagine. Moi j'étais juste là parce qu'on étais planqués.
Parmi eux, il y avait une gamine -enfin, un type dans une gamine, Imogen-, qui m'avait parlé du fait que le grand type là-haut, l'Esquisse, ou qui que ce soit se fichait de si j'étais là, et que de toute manière j'étais chanceuse d'être encore moi. Elle -il ?- l'avait pas dit comme ça, mais c'est ça que j'ai compris après y avoir réfléchi. Et j'y ai réfléchi trop tard, comme d'habitude.
J'aurais pas dû m'énerver auprès des autres. J'aurais pas dû quitter le bâtiment. C'est tout moi, ça : je fais des conneries. Et forcément, j'ai voulu rentrer au manoir, pour trouver un peu de calme. A la bonne heure ! J'avais bien dit que ce serait stupide : devinez quoi. Je me suis perdue. Parce que personne n'est arrivé là où il voulait aller simplement en matant ses pieds et en leur disant d'avancer.
Et donc, j'étais dedans jusqu'au cou. L'Esquisse avait finalement décidé que je valais la peine qu'on m'achève. Ou que je n'avais pas de raison d'être, je le saurai jamais.
Il y avait une fontaine : un truc de franchement mauvais goût, avec une vieille statue au centre : le genre de chose qu'on trouve dans les vieux numéros d'Astounding Stories. Y avait personne autour, et pourtant… l'endroit entier était vivant. Je suis pas vraiment claire, mais je sais vraiment pas comment le dire autrement. Je savais qu'il y avait des choses, mais ça… personne ne m'avait parlé de ça. Personne ne m'avait dit comment tout fonctionnait. Je suis sûr que certains, là-bas, au manoir, à la base, peu importe où, savaient. Ils m'auraient dit de m'arrêter. De ne pas avancer. Mais ils n'étaient pas là, et je savais pas trop quoi faire, alors évidemment, j'ai balancé ma vie en l'air.
Enfin, non. Je n'ai pas foutu ma vie en l'air : j'aurai juste essayé de le faire. J'avais encore jamais fait dans les tentatives de suicides, et je veux plus jamais recommencer. Parce que ça m'a fait mal. Très mal. Plus que la chute en voiture, plus que la fois où je m'étais ouvert le front en faisant du vélo. J'avais neuf ans. Là j'en avais vingt-trois, et pourtant j'ai pleuré comme si j'en avais deux. Merde.
Je ne sais pas pourquoi tout ça m'est arrivé ; c'est peut-être la faute du Monde, c'est peut-être ma faute, sans doute un peu des deux et beaucoup d'idiotie de ma part. Un genre de grand baptême. Imogen disait vrai, ceux en blouse disaient vrai : Et j'ai pas écouté. Mais pourquoi fallait-il que je n'écoute jamais ?
Mais j'ai fini par ressortir. Je ne sais pas combien de temps je suis restée prostrée par terre, la tête dans la poussière. Mais j'ai fini par me relever ; ça m'a pris longtemps, je crois bien. L'exploit. Et j'ai repris ma route en sens inverse, en priant pour ne pas m'effondrer en chemin. Je ne sais pas non plus à quel moment je me suis aperçue que j'avais plus aucun équilibre sur mes jambes. Trop longues. Je me suis arrêtée, je me suis regardée. Et cette fois j'étais vraiment, mais vraiment dans la merde jusqu'au cou.
Je suis rentrée en clopinant dans la base, avec deux envies : m'enterrer quelque part dans le jardin, et m'excuser auprès de quelqu'un. Puis je me suis dit que m'enterrer m'aiderait pas à trouver des excuses, alors je suis monté jusqu'à la salle de réunion. Elle y était pas, mais y avait quelqu'un dedans. J'ai failli faire demi-tour, et puis je me suis dit « et merde, après tout pourquoi pas ? ». Je suis rentrée, je me suis posée à côté d'Al, et j'ai dit, avec une voix qu'était plus vraiment celle que j'avais eu avant :
« Salut, toi. »
Et maintenant que j'y pense, c'était assez bête aussi, comme manière d’amorcer le dialogue.
- Résumé:
- Amelia rentre à la base après s'être fait violemment changer le corps par la tempête de la fontaine. Un peu choquée, elle va dans la salle de réunion et dit "Salut, toi." à Al.
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Ven 19 Aoû - 23:05
Al n'était pas de bonne humeur.
Enfin, plutôt, reprenons : par rapport à sa mauvaise humeur habituelle, notre malheureux petit rouquin était dans un état encore plus exécrable. Et infâme. Il faut dire que passer la moitié de la journée à tenter d'organiser quelque chose avec Imogen, puis courser une gamine dans la Ville, manquer de se faire courser à son tour par la faune, puis en revenir à la première activité avait de quoi être fatiguant. Encore plus quand on avait fait un cauchemar la nuit précédente, mais c'était un point dont il n'avait pas fait mention. Surtout pas à l'autre commère haute comme trois pommes.
Bref, au milieu de toute sa joie, il n'aurait pas osé dire qu'il était malgré tout satisfait. Il avait pu croiser quelques personnes en train de bosser - oui, oui, et ça ne faisait partie d'une hallucination - et même constater que les cyantifiques pouvaient se rendre utiles. Non pas qu'il en eût douté, mais cela était tout de même un point positif. Il avait exploré un peu la Ville, cela lui ayant fait comprendre à quel point il appréciait la Base. Et enfin, sésame parmi les sésames, il avait rempli le tableau de la salle de réunion d'informations utiles. Plan sommaire des lieux, liste des tâches prévisionnelles, données en tout genre.
C'est donc ainsi, bavant devant cette vision des dieux, qu'il fut soudainement accoster par.. Eh bien. Il soupira mentalement.
« Salut, toi. »
D'une, c'était quelqu'un qu'il n'avait jamais rencontré jusque là - probabilité assez élevée de tomber sur une nouvelle tête à laquelle il faudrait expliquer l'Esquisse de A à Z en passant par les caractères spéciaux et les smileys. De deux, l'inconnue lui faisait aussi le plaisir de s'asseoir à côté de lui, comme ça, signifiant probablement qu'elle comptait rester. Il n'y avait vraiment personne à embêter entre la porte et cette pièce ? Genre… Imogen ? Non ?
« Bonjour. Je… peux vous aider ? » répondit-il tout de même, la face perplexe.
Ce faisant, il porta à nouveau son regard sur le tableau. Merde quoi, on pouvait pas transformer cet endroit en office de tourisme ! (ou du moins pas tant que cette pièce serait son QG)
Enfin, plutôt, reprenons : par rapport à sa mauvaise humeur habituelle, notre malheureux petit rouquin était dans un état encore plus exécrable. Et infâme. Il faut dire que passer la moitié de la journée à tenter d'organiser quelque chose avec Imogen, puis courser une gamine dans la Ville, manquer de se faire courser à son tour par la faune, puis en revenir à la première activité avait de quoi être fatiguant. Encore plus quand on avait fait un cauchemar la nuit précédente, mais c'était un point dont il n'avait pas fait mention. Surtout pas à l'autre commère haute comme trois pommes.
Bref, au milieu de toute sa joie, il n'aurait pas osé dire qu'il était malgré tout satisfait. Il avait pu croiser quelques personnes en train de bosser - oui, oui, et ça ne faisait partie d'une hallucination - et même constater que les cyantifiques pouvaient se rendre utiles. Non pas qu'il en eût douté, mais cela était tout de même un point positif. Il avait exploré un peu la Ville, cela lui ayant fait comprendre à quel point il appréciait la Base. Et enfin, sésame parmi les sésames, il avait rempli le tableau de la salle de réunion d'informations utiles. Plan sommaire des lieux, liste des tâches prévisionnelles, données en tout genre.
C'est donc ainsi, bavant devant cette vision des dieux, qu'il fut soudainement accoster par.. Eh bien. Il soupira mentalement.
« Salut, toi. »
D'une, c'était quelqu'un qu'il n'avait jamais rencontré jusque là - probabilité assez élevée de tomber sur une nouvelle tête à laquelle il faudrait expliquer l'Esquisse de A à Z en passant par les caractères spéciaux et les smileys. De deux, l'inconnue lui faisait aussi le plaisir de s'asseoir à côté de lui, comme ça, signifiant probablement qu'elle comptait rester. Il n'y avait vraiment personne à embêter entre la porte et cette pièce ? Genre… Imogen ? Non ?
« Bonjour. Je… peux vous aider ? » répondit-il tout de même, la face perplexe.
Ce faisant, il porta à nouveau son regard sur le tableau. Merde quoi, on pouvait pas transformer cet endroit en office de tourisme ! (ou du moins pas tant que cette pièce serait son QG)
- Résumé:
Al est de sale humeur, comme d'hab, même si au fond il est content. Il s'enthousiasme devant le seul bonheur de sa journée, quand Amé arrive. Il la reconnait pas et lui demande aimablement ce qu'elle fout ici.
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Lun 22 Aoû - 19:35
Je m'attendais à ce qu'on ne me reconnaisse pas : malgré tout, ça m'a fait un choc. Pas parce que je n'avais plus l'apparence que j'avais avant, mais parce que ça voulait dire que tout ce que j'étais, tout ce que j'avais fait ici, depuis que j'avais été débarquée dans cette plaine jusqu'à ce moment ridicule avec Al ; tout ça venait d'être effacé. Je n'étais plus Amelia. J'étais… je ne savais pas qui j'étais. Est-ce que j'avais emprunté le visage d'un cadavre ? Est-ce que quelqu'un avait connu la personne dont j'avais les traits ? Et surtout, une question subsistait lorsque j'écartais toutes les autres : pourquoi moi ?
Et Al restait tourné vers un tableau couvert d'idéogrammes avec un air crétin, donnant sincèrement l'impression qu'il essayait de battre un record. De là à dire lequel… peut-être que ça avait à voir avec sa mauvaise humeur permanente. Je l'ai laissé décanter un peu, et puis j'ai laissé échapper un petit rire.
« … Ouais. Ouais, tu peux m'aider. J'ai une putain de liste de doléances, comme tout le monde, forcément. »
J'ai fait une petite pause. En réalité, j'avais dit ça mais n'avais aucune idée de ce qui allait suivre. Dans le doute, je l'ai fermée, et j'ai profité du silence.
Pour patienter le temps que vienne l'inspiration, j'ai regardé le tableau d'Al. Il l'avait entièrement couvert avec ses pattes de mouche et devait en être vachement fier. Tout ce qui était dessus était probablement utile sous réserve qu'on le déchiffre: je me suis surprise à penser ça et je me suis collée une baffe métaphorique. C'était le seul type qui bossait un peu dans la base et je me foutais de lui. Je me suis tournée sur ma chaise, dans sa direction, et j'ai cherché son regard. J'avais des trucs à dire, un paquet de trucs à dire, et peu importe à qui. Al était là, il s'y collerait. J'ai ouvert la bouche et pris une longue inspiration ; une boule s'est formée dans ma gorge. Et j'ai tout lâché.
« ... J'ai pas cette putain de liste, Al. Personne l'a, et y en a jamais eu. Je suis juste là parce que je sais pas quoi faire. Non, parce que je sais plus quoi faire. Enfin, il y a bien… Je devrais peut-être… je devrais peut-être vous demander pardon. »
Je l'ai regardé droit dans les yeux, avec tout mon courage.
Je les ai baissés au bout d'une seconde.
Et Al restait tourné vers un tableau couvert d'idéogrammes avec un air crétin, donnant sincèrement l'impression qu'il essayait de battre un record. De là à dire lequel… peut-être que ça avait à voir avec sa mauvaise humeur permanente. Je l'ai laissé décanter un peu, et puis j'ai laissé échapper un petit rire.
« … Ouais. Ouais, tu peux m'aider. J'ai une putain de liste de doléances, comme tout le monde, forcément. »
J'ai fait une petite pause. En réalité, j'avais dit ça mais n'avais aucune idée de ce qui allait suivre. Dans le doute, je l'ai fermée, et j'ai profité du silence.
Pour patienter le temps que vienne l'inspiration, j'ai regardé le tableau d'Al. Il l'avait entièrement couvert avec ses pattes de mouche et devait en être vachement fier. Tout ce qui était dessus était probablement utile sous réserve qu'on le déchiffre: je me suis surprise à penser ça et je me suis collée une baffe métaphorique. C'était le seul type qui bossait un peu dans la base et je me foutais de lui. Je me suis tournée sur ma chaise, dans sa direction, et j'ai cherché son regard. J'avais des trucs à dire, un paquet de trucs à dire, et peu importe à qui. Al était là, il s'y collerait. J'ai ouvert la bouche et pris une longue inspiration ; une boule s'est formée dans ma gorge. Et j'ai tout lâché.
« ... J'ai pas cette putain de liste, Al. Personne l'a, et y en a jamais eu. Je suis juste là parce que je sais pas quoi faire. Non, parce que je sais plus quoi faire. Enfin, il y a bien… Je devrais peut-être… je devrais peut-être vous demander pardon. »
Je l'ai regardé droit dans les yeux, avec tout mon courage.
Je les ai baissés au bout d'une seconde.
- Résumé:
- Amelia demande pardon à Al.
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Mar 23 Aoû - 0:21
....Et en plus elle se mettait à rire en évoquant sa liste de plaintes. Al concevait deux possibilités, chacune capables de justifier un état d'énervement passager de sa part. La première proposait qu'il s'agissait d'un hasard, potentiellement appuyé par une lecture du tableau de la part de la demoiselle, qui avait certainement trouvé amusant de le charrier. Pourquoi était-ce un problème récurrent chez les filles ? Ce n'était pas qu'il détestait les filles ou faisait preuve de mysogynie, bien entendu, mais…
La deuxième possibilité impliquait que quelqu'un l'ait briefée auparavant et ait monté cette situation dans le but de lui faire une farce. Dans ce cas, il s'agissait forcément de Ziza ou Gunnel. Tch.
Tandis qu'il évaluait différentes probabilités en attendant la suite de la blague, il constata que celle-ci ne venait pas. Pas plus que le bruit d'une feuille que l'on sort d'une poche. Pas plus que le marqueur que l'on prend pour écrire sur le tableau. Pas plus que le rire ou le son de la voix.
Fatalement, il lança un regard accusateur vers son interlocutrice, prêt à la sommer de cracher enfin le morceau. Il s'évita ainsi - par les joies propres au timing - de passer davantage pour un connard. Parce que la réplique suivante déboula, accompagnée d'un bref mais profond regard planté droit dans les rétines.
« Ah. » lâcha-t-il pour toute réponse, face à la jeune femme qui lui paraissait soudainement… Troublée.
Il s'éloigna d'elle, les yeux bien vite détournés de leur emplacement, puis fit quelques pas dans la salle de réunion. Il.. fallait le prendre comme une énigme. Tirer un minimum de conclusions pour l'instant.
« Donc.... En clair, tu me connais, tu es perdue, tu ne sais plus quoi faire et tu as des excuses à faire. En me basant sur ces critères, je pourrais aboutir à une bien trop grande quantité de réponses différentes… Avant les excuses, je suggère donc une présentation. »
Pour déclarer tout cela presque solennellement (malgré la présence des hésitations en règle) en croisant les bras, il fallait effectivement avoir été endurci - ou épuisé ? - par une journée passée à inspecter, désespérer, faire des listes, tenter de se rendre utile, etc. Il fallait faire genre qu'on n'était plus à une situation étrange près : qu'est-ce qui pourrait arriver de pire maintenant qu'il avait réussi à retrouver un membre de sa famille dans ce monde pourri ? Ahah.
Cette fois, il allait tenter de résoudre la situation de façon logique.
(Parce que même dans l'Esquisse, Al restait un grand naïf qui débutait toute nouvelle expérience par un « Je vais réussir à gérer ça », c'était presque un tic nerveux)
La deuxième possibilité impliquait que quelqu'un l'ait briefée auparavant et ait monté cette situation dans le but de lui faire une farce. Dans ce cas, il s'agissait forcément de Ziza ou Gunnel. Tch.
Tandis qu'il évaluait différentes probabilités en attendant la suite de la blague, il constata que celle-ci ne venait pas. Pas plus que le bruit d'une feuille que l'on sort d'une poche. Pas plus que le marqueur que l'on prend pour écrire sur le tableau. Pas plus que le rire ou le son de la voix.
Fatalement, il lança un regard accusateur vers son interlocutrice, prêt à la sommer de cracher enfin le morceau. Il s'évita ainsi - par les joies propres au timing - de passer davantage pour un connard. Parce que la réplique suivante déboula, accompagnée d'un bref mais profond regard planté droit dans les rétines.
« Ah. » lâcha-t-il pour toute réponse, face à la jeune femme qui lui paraissait soudainement… Troublée.
Il s'éloigna d'elle, les yeux bien vite détournés de leur emplacement, puis fit quelques pas dans la salle de réunion. Il.. fallait le prendre comme une énigme. Tirer un minimum de conclusions pour l'instant.
« Donc.... En clair, tu me connais, tu es perdue, tu ne sais plus quoi faire et tu as des excuses à faire. En me basant sur ces critères, je pourrais aboutir à une bien trop grande quantité de réponses différentes… Avant les excuses, je suggère donc une présentation. »
Pour déclarer tout cela presque solennellement (malgré la présence des hésitations en règle) en croisant les bras, il fallait effectivement avoir été endurci - ou épuisé ? - par une journée passée à inspecter, désespérer, faire des listes, tenter de se rendre utile, etc. Il fallait faire genre qu'on n'était plus à une situation étrange près : qu'est-ce qui pourrait arriver de pire maintenant qu'il avait réussi à retrouver un membre de sa famille dans ce monde pourri ? Ahah.
Cette fois, il allait tenter de résoudre la situation de façon logique.
(Parce que même dans l'Esquisse, Al restait un grand naïf qui débutait toute nouvelle expérience par un « Je vais réussir à gérer ça », c'était presque un tic nerveux)
- Spoiler:
Résumé : Al est d'abord en mode "... e_e ???" puis il s'éloigne et essaie de lui demander, par une formulation pompeuse comme il les aime, qui elle est.
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Mar 23 Aoû - 1:30
De la réponse d'Al, j'ai tiré deux conclusions : il ne savait pas réfléchir à voix basse, et il était assez mauvais au niveau déductions. J'ai soupiré juste assez fort pour qu'il l'entende.
« T'as rien compris, pas vrai ? Comme à la réunion. Tu t'es juste enfui, comme ça, sans dire au revoir, histoire qu'on ne te voie pas piquer une crise de nerfs. C'est pareil, juste que tu t'es foutu dans l'autre sens. »
Je me suis penché vers lui par dessus la chaise qu'il avait laissé vide, et je l'ai regardé de près. C'était un gosse, merde ! Il était pas plus vieux que moi, quelques années en moins peut-être. C'était un gosse et il s'occupait d'une trentaine de personnes. Il avait même dessiné toutes ses putain d'idées sur un putain de tableau. Si lui représentait le fer de lance de l'administration, eh bien… autant trouver une pelle et s'enterrer tout de suite.
Quoique. Il ne méritait pas tout ça. C'était peut-être un gosse, sans doute en plein milieu d'une crise d'adolescence, et il avait forcément pris ce rôle par orgueil ou parce qu'il avait peur, mais… merde, il n'y avait personne pour l'aider. La « logistique » n'était constituée que de deux jeunes et une gamine. Le reste n'existait pas, glandait ou mieux, s'était enfui. Malgré tout ça, j'ai continué.
« J'ai rien contre toi, Al. Je vais même me présenter. Mais d'abord, écoute ça un peu, pendant que je suis encore personne pour toi. Je sais que c'est toi qui as noirci ce tableau. Je suis sûr que t'en es très fier. Mais écoute : c'est foutu. Je… je l'ai vu dehors. Je l'ai ressenti. Et c'était pas agréable, Al. Je sais même plus quoi croire, tu sais… »
J'ai à nouveau tenté de le regarder dans les yeux, et cette fois-ci ça a marché pendant plus d'une seconde.
« Ecoute, Al. Là-dehors, y a un truc qui se fiche de nous -mieux, il ne nous remarque même pas. Il est immensément dangereux. Et tu sais ce que c'est, Al ? C'est le monde. Le putain de monde peut nous tuer, et toi tu fais des dessins pendant qu'une abrutie prépare une poignée de cookies à l'étage pour nourrir une bande de gamins ! Et qu'une troisième tente le suicide en allant dans les ruines toute seule ! La base, c'est un château de sable, et il suffit qu'il marche dessus ! »
A partir d'un moment je me suis aperçue que j'avais haussé le ton, et je j'étais maintenant très, très proche de la figure d'Al. Je me suis éloignée lentement, et je me suis rassise. Je crois que c'est là que je me suis mise à pleurer. Mais j'ai pas lâché Al du regard. Du moins je ne crois pas que je l'ai fait.
« Je sais plus quoi croire, merde… Alors, Al, s'il te plaît… donne moi juste une raison pour continuer toutes ces conneries. Je pensais que tout allait bien, jusqu'à… si ça se trouve je suis morte, et toi t'es juste un putain d'ange en train de se foutre de moi. Ou alors t'es vivant, et t'es toujours le même gosse effrayé, qui veut juste en finir pour retourner faire sa vie normalement. Alors donne-moi une bonne raison de continuer ce que je fais. Fais ton job, Al. Organise. »
J'ai essuyé mes larmes sur la manche d'un t-shirt qui n'était pas le mien, et j'ai soufflé un peu. Il ne restait plus qu'une petite chose à faire.
« Maintenant… maintenant je crois que je peux me présenter. Je suis… j'étais… Je suis Amelia, Al. Amy Walker. Et maintenant convaincs-moi. »
« T'as rien compris, pas vrai ? Comme à la réunion. Tu t'es juste enfui, comme ça, sans dire au revoir, histoire qu'on ne te voie pas piquer une crise de nerfs. C'est pareil, juste que tu t'es foutu dans l'autre sens. »
Je me suis penché vers lui par dessus la chaise qu'il avait laissé vide, et je l'ai regardé de près. C'était un gosse, merde ! Il était pas plus vieux que moi, quelques années en moins peut-être. C'était un gosse et il s'occupait d'une trentaine de personnes. Il avait même dessiné toutes ses putain d'idées sur un putain de tableau. Si lui représentait le fer de lance de l'administration, eh bien… autant trouver une pelle et s'enterrer tout de suite.
Quoique. Il ne méritait pas tout ça. C'était peut-être un gosse, sans doute en plein milieu d'une crise d'adolescence, et il avait forcément pris ce rôle par orgueil ou parce qu'il avait peur, mais… merde, il n'y avait personne pour l'aider. La « logistique » n'était constituée que de deux jeunes et une gamine. Le reste n'existait pas, glandait ou mieux, s'était enfui. Malgré tout ça, j'ai continué.
« J'ai rien contre toi, Al. Je vais même me présenter. Mais d'abord, écoute ça un peu, pendant que je suis encore personne pour toi. Je sais que c'est toi qui as noirci ce tableau. Je suis sûr que t'en es très fier. Mais écoute : c'est foutu. Je… je l'ai vu dehors. Je l'ai ressenti. Et c'était pas agréable, Al. Je sais même plus quoi croire, tu sais… »
J'ai à nouveau tenté de le regarder dans les yeux, et cette fois-ci ça a marché pendant plus d'une seconde.
« Ecoute, Al. Là-dehors, y a un truc qui se fiche de nous -mieux, il ne nous remarque même pas. Il est immensément dangereux. Et tu sais ce que c'est, Al ? C'est le monde. Le putain de monde peut nous tuer, et toi tu fais des dessins pendant qu'une abrutie prépare une poignée de cookies à l'étage pour nourrir une bande de gamins ! Et qu'une troisième tente le suicide en allant dans les ruines toute seule ! La base, c'est un château de sable, et il suffit qu'il marche dessus ! »
A partir d'un moment je me suis aperçue que j'avais haussé le ton, et je j'étais maintenant très, très proche de la figure d'Al. Je me suis éloignée lentement, et je me suis rassise. Je crois que c'est là que je me suis mise à pleurer. Mais j'ai pas lâché Al du regard. Du moins je ne crois pas que je l'ai fait.
« Je sais plus quoi croire, merde… Alors, Al, s'il te plaît… donne moi juste une raison pour continuer toutes ces conneries. Je pensais que tout allait bien, jusqu'à… si ça se trouve je suis morte, et toi t'es juste un putain d'ange en train de se foutre de moi. Ou alors t'es vivant, et t'es toujours le même gosse effrayé, qui veut juste en finir pour retourner faire sa vie normalement. Alors donne-moi une bonne raison de continuer ce que je fais. Fais ton job, Al. Organise. »
J'ai essuyé mes larmes sur la manche d'un t-shirt qui n'était pas le mien, et j'ai soufflé un peu. Il ne restait plus qu'une petite chose à faire.
« Maintenant… maintenant je crois que je peux me présenter. Je suis… j'étais… Je suis Amelia, Al. Amy Walker. Et maintenant convaincs-moi. »
- Résumé:
- Amelia demande des trucs à Al et lui dit qui elle est.
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Mar 23 Aoû - 3:27
Elle s'était foutue de sa gueule.
Purement et simplement, sans le moindre effet de style pour enjoliver la scène. Pendant quelques instants - instants éternels et noyés par un discours qui lui claquait la figure par intermittences sans lui donner les armes pour répliquer. Enfin, les baffes, c'était rien qu'une préambule avant de passer aux poings, pas vrai ? Et vas'y que je t'appelle Al, Al, Al, encore… Mon doigt pointé vers ton égo, je piétine ta fierté.
Et qu'est-ce qu'on fait d'une bouillie de fierté ? Oh, allons, Al, on la fout six pieds sous terre. Ben ouais, on t'avait pas assez dit que le monde était cruel, que cette putain de ville avait de quoi te tuer en un coup ! T'as le droit de relever la tête, hein, Al, sinon tu te suicides, mais on viendra tous les jours te foutre des taloches jusqu'à ce que tu la baisses. Et que tu te roules par terre en te souvenant à quel point t'es minable, Al, pauvre con ! Et si malgré tout tu résistes, j'aurai mes yeux juste en face des tiens, un ciseau dans les mains pour te les crever. Ça fait quoi, Al, de jouer au petit chef et d'être ridiculement pathétique ? On se sent fier, on joue aux légos, Al ? Mais tout ça, tu sais, mon grand, c'est "mathématiquement"….
I-N-U-T-I….
Il se força à reprendre sa respiration. La garce s'était reculée, ce dont il profita pour s'éloigner de plusieurs pas. Ce qu'il restait de lui, intérieurement, gémissant plus au sol qu'il ne ralait, lorgnait vers la sortie et proposait de prendre ses jambes à son coup. Il se fichait de cette fille. Il se fichait de ce qu'elle disait. Il se fichait de tout il se fichait…
Des pleurs ?
Elle venait de le démonter et maintenant elle chialait en le fixant ? Elle voulait une raison, ou même une consolation, après avoir foutu le bordel dans sa tête et piétiné les entrailles de ses motivations ? Est-ce que c'était autre chose qu'un putain de foutage de gueule ?
....L-E ?
« Maintenant… maintenant je crois que je peux me présenter. Je suis… j'étais… Je suis Amelia, Al. Amy Walker. Et maintenant convaincs-moi. »
Ouais, c'était la blague de l'année et elle était terriblement bonne. S'il avait pas été à deux doigts de la rejoindre dans ses pleurnicheries, p'têtre bien qu'il aurait ri à s'en fendre la poire. Ça aurait résonné dans toute la salle de réunion. Son gloussement aurait fini par lui déboiter la mâchoire et il se serait roulé par terre à en perdre la respiration. Il en serait mort et aurait plus eu à se soucier de toutes les emmerdes à deux balles qui lui collaient au train. Ahahah….
Sauf qu'il était encore là, au beau milieu de la pièce, qu'il faisait encore plus froid que d'habitude et que c'était elle qui lui demandait si elle était encore en vie. Sauf que faute de savoir gérer une conversation sans en faire un mélodrame, il commençait à avoir de l'expérience. Ou plutôt, l'habitude, une tendance à savoir à quelle point sa réponse serait une antithèse de la motivation.
« Amelia, ça explique des choses… grinça-t-il. Merci... pour le discours, j'apprécie toujours autant les douches bien froides en fin de journée. Maintenant permets-moi..»
Il se cala sur un siège. Loin de celle qu'il ne faisait que regarder du coin de l'oeil. Il inspira et pinça lentement la fameuse boule dans la gorge jusqu'à ce qu'elle se tire. Au passage, il tacla aussi la politesse, mais c'était une habitude récurrente avec Amelia, avant d'entamer un monologue ponctué de bredouillements.
« Si t'espérais que je mette les mains sur les hanches et te récite le théorème qui prouve qu'on va gagner, survivre, rentrer chez nous, être heureux et avoir un avenir radieux en suivant un tuto à cinq étapes, tu rêves encore plus que moi. Ce tableau n'existe même pas pour le chercher, puisqu'il y a tant de gens comme toi qui se ramènent pour gueuler qu'on va tous crever.. Je crois même qu'on le sait tous au fond, même moi, aussi étonnant que cela puisse te paraître. »
Le fil de sa pensée se déroulait en même temps qu'il luttait, à l'oral comme dans sa tête, pour aligner les mots.
« Je vais pas te dire non plus que les logisticiens vont trouver un plan efficace. C'est pas vrai, parce qu'on sait rien, qu'on peut rien faire, qu'on a plus de cookies dans le frigo que de gens capables de se battre - et contre qui on se bat d'ailleurs ? Des tempêtes qui peuvent nous transformer en steak haché, des pays entiers d'objets qui débarquent en masse, des types en blouses qui veulent probablement nous tuer ? Woaouh, c'est fou, les statistiques semblent prédire qu'on est mal barré, Amélia ! »
Après avoir mimé l'étonnement, il supprima les quelques tons qui s'étaient ajoutés à son monologue et en revint à des formulations plus calmes.
Pour des mots qui ne l'étaient pas moins.
« En fait, ce qui m'énerve le plus, tu sais, j'ai réfléchi sur la question… C'est peut-être moins les sales gosses qui décident de créer une secte vouée au fétichisme des étoiles de mer que ceux qui pourraient agir mais se servent de la situation - désespérée, j'en conviens - pour dire qu'il faut tout larguer ou attendre. Autrement dit : tu m'énerves, Amelia. »
Il laissa flotter le silence, le léger intermède qui lui permettait de savoir à quel point il avait un don pour insulter toute personne attendant du réconfort. Et pourtant il se retrouvait toujours dans ce genre de situations...
« Tu m'énerves, parce que tu sais très bien ce qui se passe, mais t'es pas capable d'aller au-delà. Pour l'instant on est encore en vie, la Base s'est pas faite piétiner par une catastrophe naturelle. Ce monde nous colle aucune raison pour continuer, mais bordel, pour le moment, on s'en fiche. T'as un corps, philosophe pas, lève-toi et viens m'aider à faire le ménage. Fais comme tout le monde et pense à la dernière brioche de Ji-sung, aux objets mignons ou à tout ce que tu trouveras frivole. Sois conne, ça a l'air de marcher vu le nombre d'idiots qui survivent. Sois conne et accroche-toi aux autres cons sans te poser de questions, y'a probablement pas de meilleure stratégie. »
Cette fois, il sentait les tacles de son inconscient achever un cadavre qui baignait déjà dans son plasma. Complètement embarrassé (eh non, les discours passionnés et vulgaires ne lui venaient pas si souvent, sur Terre), il détourna complètement le regard de l'autre rouquine. Pour son plus grand malheur, Roxie n'était même plus là pour le soutenir psychologiquement. C'était en se débarrassant de ce refuge-ci qu'il avait pu rejoindre les cons, lui aussi.
Purement et simplement, sans le moindre effet de style pour enjoliver la scène. Pendant quelques instants - instants éternels et noyés par un discours qui lui claquait la figure par intermittences sans lui donner les armes pour répliquer. Enfin, les baffes, c'était rien qu'une préambule avant de passer aux poings, pas vrai ? Et vas'y que je t'appelle Al, Al, Al, encore… Mon doigt pointé vers ton égo, je piétine ta fierté.
Et qu'est-ce qu'on fait d'une bouillie de fierté ? Oh, allons, Al, on la fout six pieds sous terre. Ben ouais, on t'avait pas assez dit que le monde était cruel, que cette putain de ville avait de quoi te tuer en un coup ! T'as le droit de relever la tête, hein, Al, sinon tu te suicides, mais on viendra tous les jours te foutre des taloches jusqu'à ce que tu la baisses. Et que tu te roules par terre en te souvenant à quel point t'es minable, Al, pauvre con ! Et si malgré tout tu résistes, j'aurai mes yeux juste en face des tiens, un ciseau dans les mains pour te les crever. Ça fait quoi, Al, de jouer au petit chef et d'être ridiculement pathétique ? On se sent fier, on joue aux légos, Al ? Mais tout ça, tu sais, mon grand, c'est "mathématiquement"….
I-N-U-T-I….
Il se força à reprendre sa respiration. La garce s'était reculée, ce dont il profita pour s'éloigner de plusieurs pas. Ce qu'il restait de lui, intérieurement, gémissant plus au sol qu'il ne ralait, lorgnait vers la sortie et proposait de prendre ses jambes à son coup. Il se fichait de cette fille. Il se fichait de ce qu'elle disait. Il se fichait de tout il se fichait…
Des pleurs ?
Elle venait de le démonter et maintenant elle chialait en le fixant ? Elle voulait une raison, ou même une consolation, après avoir foutu le bordel dans sa tête et piétiné les entrailles de ses motivations ? Est-ce que c'était autre chose qu'un putain de foutage de gueule ?
....L-E ?
« Maintenant… maintenant je crois que je peux me présenter. Je suis… j'étais… Je suis Amelia, Al. Amy Walker. Et maintenant convaincs-moi. »
Ouais, c'était la blague de l'année et elle était terriblement bonne. S'il avait pas été à deux doigts de la rejoindre dans ses pleurnicheries, p'têtre bien qu'il aurait ri à s'en fendre la poire. Ça aurait résonné dans toute la salle de réunion. Son gloussement aurait fini par lui déboiter la mâchoire et il se serait roulé par terre à en perdre la respiration. Il en serait mort et aurait plus eu à se soucier de toutes les emmerdes à deux balles qui lui collaient au train. Ahahah….
Sauf qu'il était encore là, au beau milieu de la pièce, qu'il faisait encore plus froid que d'habitude et que c'était elle qui lui demandait si elle était encore en vie. Sauf que faute de savoir gérer une conversation sans en faire un mélodrame, il commençait à avoir de l'expérience. Ou plutôt, l'habitude, une tendance à savoir à quelle point sa réponse serait une antithèse de la motivation.
« Amelia, ça explique des choses… grinça-t-il. Merci... pour le discours, j'apprécie toujours autant les douches bien froides en fin de journée. Maintenant permets-moi..»
Il se cala sur un siège. Loin de celle qu'il ne faisait que regarder du coin de l'oeil. Il inspira et pinça lentement la fameuse boule dans la gorge jusqu'à ce qu'elle se tire. Au passage, il tacla aussi la politesse, mais c'était une habitude récurrente avec Amelia, avant d'entamer un monologue ponctué de bredouillements.
« Si t'espérais que je mette les mains sur les hanches et te récite le théorème qui prouve qu'on va gagner, survivre, rentrer chez nous, être heureux et avoir un avenir radieux en suivant un tuto à cinq étapes, tu rêves encore plus que moi. Ce tableau n'existe même pas pour le chercher, puisqu'il y a tant de gens comme toi qui se ramènent pour gueuler qu'on va tous crever.. Je crois même qu'on le sait tous au fond, même moi, aussi étonnant que cela puisse te paraître. »
Le fil de sa pensée se déroulait en même temps qu'il luttait, à l'oral comme dans sa tête, pour aligner les mots.
« Je vais pas te dire non plus que les logisticiens vont trouver un plan efficace. C'est pas vrai, parce qu'on sait rien, qu'on peut rien faire, qu'on a plus de cookies dans le frigo que de gens capables de se battre - et contre qui on se bat d'ailleurs ? Des tempêtes qui peuvent nous transformer en steak haché, des pays entiers d'objets qui débarquent en masse, des types en blouses qui veulent probablement nous tuer ? Woaouh, c'est fou, les statistiques semblent prédire qu'on est mal barré, Amélia ! »
Après avoir mimé l'étonnement, il supprima les quelques tons qui s'étaient ajoutés à son monologue et en revint à des formulations plus calmes.
Pour des mots qui ne l'étaient pas moins.
« En fait, ce qui m'énerve le plus, tu sais, j'ai réfléchi sur la question… C'est peut-être moins les sales gosses qui décident de créer une secte vouée au fétichisme des étoiles de mer que ceux qui pourraient agir mais se servent de la situation - désespérée, j'en conviens - pour dire qu'il faut tout larguer ou attendre. Autrement dit : tu m'énerves, Amelia. »
Il laissa flotter le silence, le léger intermède qui lui permettait de savoir à quel point il avait un don pour insulter toute personne attendant du réconfort. Et pourtant il se retrouvait toujours dans ce genre de situations...
« Tu m'énerves, parce que tu sais très bien ce qui se passe, mais t'es pas capable d'aller au-delà. Pour l'instant on est encore en vie, la Base s'est pas faite piétiner par une catastrophe naturelle. Ce monde nous colle aucune raison pour continuer, mais bordel, pour le moment, on s'en fiche. T'as un corps, philosophe pas, lève-toi et viens m'aider à faire le ménage. Fais comme tout le monde et pense à la dernière brioche de Ji-sung, aux objets mignons ou à tout ce que tu trouveras frivole. Sois conne, ça a l'air de marcher vu le nombre d'idiots qui survivent. Sois conne et accroche-toi aux autres cons sans te poser de questions, y'a probablement pas de meilleure stratégie. »
Cette fois, il sentait les tacles de son inconscient achever un cadavre qui baignait déjà dans son plasma. Complètement embarrassé (eh non, les discours passionnés et vulgaires ne lui venaient pas si souvent, sur Terre), il détourna complètement le regard de l'autre rouquine. Pour son plus grand malheur, Roxie n'était même plus là pour le soutenir psychologiquement. C'était en se débarrassant de ce refuge-ci qu'il avait pu rejoindre les cons, lui aussi.
- résumé:
Al est vachement en colère et blessé de ce qu'a dit Amé. Il lui dit qu'il a compris la situation mais qu'il lui conseille de juste passer outre et vivre sans raison particulière, au jour le jour (sauf que c'est dit en mode drama)
Invité
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Mar 23 Aoû - 14:49
J'aurais aimé pouvoir dire « tout s'est bien passé ». Al m'aurait rassuré. Il aurait mis une main sur mon épaule, au plus, mais le contact aurait pu être fait, et quelques mots auraient suffi. Du moins, ils auraient suffi en surface. Ça aurait été suffisant. Je me serais montrée forte, érigeant à nouveau la façade que je montrais habituellement aux gens. Mais non.
Au lieu de tout ça, je suis juste restée bouche bée devant lui, à l'écouter détruire à travers mon rideau de larmes, mot par mot, tout ce qui s'était passé, tout ce qui avait été détruit et reconstruit cette dernière heure. Et pire que ça : je l'énervais. Et pendant un instant, un instant seulement, je me suis énervée à mon tour. Je me suis demandé ce qui lui serait arrivé si il était tombé à ma place, là-bas, dans la fontaine. Si je ne devais pas lui montrer. Si je ne devais pas lui faire ravaler tout son vocabulaire pompeux et toutes ses formules à la con.
Mais je ne l'ai pas fait. Je suis simplement restée là, recroquevillée dans le creux de ma chaise, et j'ai pleuré plus fort. Parce qu'il avait raison, et que le déni restait encore la meilleure solution. Cependant…
« Je peux pas faire ça. »
C'était sorti naturellement, et je ne savais pas pourquoi j'avais dit ça. Peut-être à cause de ce que j'avais vu, peut-être parce que j'avais trop peur de revenir à la case départ. Sans doute parce que j'étais trop lâche. J'étais lâche, faible et misérable, et tout ça était très, très dur à supporter.
« … j'ai déjà donné, Al. Et… et toi, là… tu veux juste que j'oublie, pas vrai. Est-ce que tu sais, seulement… est-ce que tu… »
La suite est un peu floue. Je crois que je me suis levée et que j'ai foncé vers lui, avant de le saisir par le col, des deux mains. Je devais avoir l'air minable, à ce moment-là, et je ne voyais plus qu'une vague tâche à la place que devait occuper Al. Pourtant, je me souviens très bien des mots que j'ai prononcé, et je ne les ai pas prononcés calmement.
« … Je suis pas une putain de girouette, Al ! Je suis pas cette putain d'Amy décomplexée ! … je sais même plus qui je suis, merde ! Espèce de… espèce de… »
J'ai levée la main, comme pour le frapper. Et je me suis effondrée par terre comme un petit tas de chiffons.
« … Dans la tempête, dehors… quand mon corps a changé… tu sais, Al… personne a jamais dit que ça devait être indolore. »
J'ai relevé les yeux vers lui, vers cet idiot qui se considérait comme « monsieur je-sais-tout ». Et j'ai compris pourquoi je pleurais à ce point.
« Al… comment tu veux que je fasse… si ça peut arriver à… à n'importe lequel d'entre vous ? On est les organisateurs et… et… qu'est-ce que tu vas faire si l'un de… l'un de ceux que t'as envoyé… »
Mais la fin s'est perdue dans une série de sanglots.
Au lieu de tout ça, je suis juste restée bouche bée devant lui, à l'écouter détruire à travers mon rideau de larmes, mot par mot, tout ce qui s'était passé, tout ce qui avait été détruit et reconstruit cette dernière heure. Et pire que ça : je l'énervais. Et pendant un instant, un instant seulement, je me suis énervée à mon tour. Je me suis demandé ce qui lui serait arrivé si il était tombé à ma place, là-bas, dans la fontaine. Si je ne devais pas lui montrer. Si je ne devais pas lui faire ravaler tout son vocabulaire pompeux et toutes ses formules à la con.
Mais je ne l'ai pas fait. Je suis simplement restée là, recroquevillée dans le creux de ma chaise, et j'ai pleuré plus fort. Parce qu'il avait raison, et que le déni restait encore la meilleure solution. Cependant…
« Je peux pas faire ça. »
C'était sorti naturellement, et je ne savais pas pourquoi j'avais dit ça. Peut-être à cause de ce que j'avais vu, peut-être parce que j'avais trop peur de revenir à la case départ. Sans doute parce que j'étais trop lâche. J'étais lâche, faible et misérable, et tout ça était très, très dur à supporter.
« … j'ai déjà donné, Al. Et… et toi, là… tu veux juste que j'oublie, pas vrai. Est-ce que tu sais, seulement… est-ce que tu… »
La suite est un peu floue. Je crois que je me suis levée et que j'ai foncé vers lui, avant de le saisir par le col, des deux mains. Je devais avoir l'air minable, à ce moment-là, et je ne voyais plus qu'une vague tâche à la place que devait occuper Al. Pourtant, je me souviens très bien des mots que j'ai prononcé, et je ne les ai pas prononcés calmement.
« … Je suis pas une putain de girouette, Al ! Je suis pas cette putain d'Amy décomplexée ! … je sais même plus qui je suis, merde ! Espèce de… espèce de… »
J'ai levée la main, comme pour le frapper. Et je me suis effondrée par terre comme un petit tas de chiffons.
« … Dans la tempête, dehors… quand mon corps a changé… tu sais, Al… personne a jamais dit que ça devait être indolore. »
J'ai relevé les yeux vers lui, vers cet idiot qui se considérait comme « monsieur je-sais-tout ». Et j'ai compris pourquoi je pleurais à ce point.
« Al… comment tu veux que je fasse… si ça peut arriver à… à n'importe lequel d'entre vous ? On est les organisateurs et… et… qu'est-ce que tu vas faire si l'un de… l'un de ceux que t'as envoyé… »
Mais la fin s'est perdue dans une série de sanglots.
- Résumé:
- Amelia pleure encore et demande à Al un truc éthique.
Invité
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Mar 23 Aoû - 18:50
Qui sème le vent récolte la tempête. Il avait sincèrement terminé son discours sans penser à ce qui allait suivre, tout au plus en considérant qu'il assumait jusqu'à l'os.
Jusqu'à ce qu'elle vienne l'empoigner comme une vulgaire peluche, il aurait pu poursuivre le même discours malgré les pleurs incessants d'Amelia. Parce que colère et compassion s'équilibraient, se mélangeaient et ne voulaient plus rien dire.
Félicitations, hein, vraiment. Non seulement tu sers à rien, mais en plus tu as un don pour empirer ce qui pourrait se régler par quelques mots. Encore heureux qu'elle ait pas laissé son empreinte de main sur ta joue, il aurait fallu l'expliquer à Cydna et aux autres. Tu serais officiellement devenu le pire, Al.
Il attendit qu'elle ne puisse plus parler, recevant chacune de ses paroles comme des poings dans la figure. Il la surplombait, elle qui s'était affalée au sol après avoir manqué de lui en foutre une pour de vrai. Il n'était pas encore venu la rejoindre en pleurnichant à côté d'elle comme cela aurait été le cas plusieurs jours auparavant.
Il la surplombait mais probablement juste parce qu'il n'aimait pas s'écraser devant n'importe qui. Pour le reste, elle lui avait complètement coupé le sifflet. Ou plutôt, ça avait fait l'effet de voir s'écrouler un bâtiment de cinq étages sur la gueule.
« Bien sûr, je sais… »
Tant d'arrogance. Tu ne sais pas t'arrêter ?
« Je sais, Amelia… À chaque fois que je regarde Imogen, je me demande dans quel état je serais si je finissais comme lui… Ou quand j'ai retrouvé ma cousine, muette… Et maintenant, j'te r'garde… je te regarde, Amelia, et je me pose la même question. »
C'est faux. Tu la regardes même pas. Parce que t'es lâche.
« Il y a déjà des gens qui sont morts.. Certains qu'on connaissait même pas, et on sait pas s'ils vont quelque part… Il parait qu'on peut aussi vivre mais ne plus être humain.. Et dans tous les cas c'est sûrement des douleurs que je peux pas imaginer ni prédire, ça m'énerve… »
Es-tu vraiment énervé, pleurnichard ? Alors que t'es à deux doigts de demander pardon et de chialer de plus belle ?
« C'est affreux, d'accord… Mais je sais, tout ça, je suis claqué... On peut rien faire… À part remplir des tableaux et se creuser la tête pour que ça soit... moins pire. Se serrer les coudes, si tu préfères.. c'est notre boulot, même si on le foire en beauté... »
Ah ça, oui, se serrer les coudes en se détruisant mutuellement, y'a qu'ça de vrai les amis ! Ce que tu peux être un crevard infect et pétri d'égo. Un narcissique qui fait semblant d'avoir de la compassion alors qu'il ne pense qu'à ses intérêts.
« Et si tu peux pas le faire, fais comme moi, fais semblant… »
Il avait presque la tête couchée sur la table, plongée dans ses deux bras croisés. C'était le mur le plus futile du monde, complètement bancal et tremblant. Il allait ouvrir encore une fois la bouche pour réfléchir à voix haute, mais il fit le choix de se mordre les lèvres pour une fois.
Jusqu'à ce qu'elle vienne l'empoigner comme une vulgaire peluche, il aurait pu poursuivre le même discours malgré les pleurs incessants d'Amelia. Parce que colère et compassion s'équilibraient, se mélangeaient et ne voulaient plus rien dire.
Félicitations, hein, vraiment. Non seulement tu sers à rien, mais en plus tu as un don pour empirer ce qui pourrait se régler par quelques mots. Encore heureux qu'elle ait pas laissé son empreinte de main sur ta joue, il aurait fallu l'expliquer à Cydna et aux autres. Tu serais officiellement devenu le pire, Al.
Il attendit qu'elle ne puisse plus parler, recevant chacune de ses paroles comme des poings dans la figure. Il la surplombait, elle qui s'était affalée au sol après avoir manqué de lui en foutre une pour de vrai. Il n'était pas encore venu la rejoindre en pleurnichant à côté d'elle comme cela aurait été le cas plusieurs jours auparavant.
Il la surplombait mais probablement juste parce qu'il n'aimait pas s'écraser devant n'importe qui. Pour le reste, elle lui avait complètement coupé le sifflet. Ou plutôt, ça avait fait l'effet de voir s'écrouler un bâtiment de cinq étages sur la gueule.
« Bien sûr, je sais… »
Tant d'arrogance. Tu ne sais pas t'arrêter ?
« Je sais, Amelia… À chaque fois que je regarde Imogen, je me demande dans quel état je serais si je finissais comme lui… Ou quand j'ai retrouvé ma cousine, muette… Et maintenant, j'te r'garde… je te regarde, Amelia, et je me pose la même question. »
C'est faux. Tu la regardes même pas. Parce que t'es lâche.
« Il y a déjà des gens qui sont morts.. Certains qu'on connaissait même pas, et on sait pas s'ils vont quelque part… Il parait qu'on peut aussi vivre mais ne plus être humain.. Et dans tous les cas c'est sûrement des douleurs que je peux pas imaginer ni prédire, ça m'énerve… »
Es-tu vraiment énervé, pleurnichard ? Alors que t'es à deux doigts de demander pardon et de chialer de plus belle ?
« C'est affreux, d'accord… Mais je sais, tout ça, je suis claqué... On peut rien faire… À part remplir des tableaux et se creuser la tête pour que ça soit... moins pire. Se serrer les coudes, si tu préfères.. c'est notre boulot, même si on le foire en beauté... »
Ah ça, oui, se serrer les coudes en se détruisant mutuellement, y'a qu'ça de vrai les amis ! Ce que tu peux être un crevard infect et pétri d'égo. Un narcissique qui fait semblant d'avoir de la compassion alors qu'il ne pense qu'à ses intérêts.
« Et si tu peux pas le faire, fais comme moi, fais semblant… »
Il avait presque la tête couchée sur la table, plongée dans ses deux bras croisés. C'était le mur le plus futile du monde, complètement bancal et tremblant. Il allait ouvrir encore une fois la bouche pour réfléchir à voix haute, mais il fit le choix de se mordre les lèvres pour une fois.
- Spoiler:
Al ne bouge pas, pleurniche, et dit à peu près pareil : c'est terrible mais que c'est leur boulot de minimiser les choses. Même s'ils font semblant.
Invité
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Mer 24 Aoû - 2:13
C'était du vent, tout ça. Tous ces mots que ressassait Al. Une putain de porte de sortie pour ceux qui ne voulaient pas regarder. Peut-être était-ce bien la meilleure voie à suivre, mais ça restait du vent. A ce point de la discussion je ne savais plus quoi penser, à part ça. J'avais eu plusieurs convictions et toutes avaient fini par s'effondrer. Celle-là faisait partie de celles qui étaient tombées en premier.
Je voyais bien où cheminait l'argument, il était assez clair. Mais je n'étais pas d'humeur à faire l'effort de l'accepter. Puis vint la dernière phrase de son long monologue. C'était tellement stupide… Je me suis prise à rire à travers mes sanglots. Ce n'était pas un rire très agréable, mais je n'arrivais pas à le réprimer. Quand il finit par se calmer dans une quinte dans toux misérable, j'avais mal à la gorge et la poitrine en feu. Je n'ai pas osée regarder Al. J'avais trop honte de moi. Pourtant, c'était tellement stupide… Je n'ai pas pu m'empêcher de trouver ça drôle, et malgré tout très triste. Quelque chose a bougé en moi.
« … Tu sais, Al… avant tout ça, j'étais une abrutie. J'avais de comptes à rendre à personne. Merde, j'ai même quitté Alice Springs parce que l'endroit me faisait chier… juste pour ça. Tu te rends compte, Al ? Je suis la pire. Quand je n'aime pas quelque chose, je le laisse sur le bas-côté sans regarder derrière moi. J'ai jamais eu quelqu'un parce que personne ne voulait de moi. Tu veux savoir pourquoi ? Parce que je faisais semblant. J'ai passé toute ma vie à fuir, et je vais pas m'arrêter là.»
Le rire est reparti de plus belle, haché par les saccades de ma respiration.
« Je suis la pire, Al. J'ai fait ma vie planquée derrière une putain de porte, et j'en ai même pas profité parce que le jour où j'ai voulu l'ouvrir, je l'avais tellement bien fermée qu'elle bougeait pas d'un centimètre. Alors, Al… pour la dernière fois… je peux plus faire semblant. »
J'ai pris plusieurs secondes de pause, pour calmer mes sanglots et essuyer mes larmes. Et puis, après une longue inspiration et une certaine préparation, j'ai dit ça :
« Plus maintenant qu'il y a un truc qui compte. Je peux pas tout changer, mais je peux espérer, au moins... changer de direction. »
Je me suis relevée et je me suis approchée de lui, et j'ai réalisé qu'il était vraiment petit. Je me suis penchée au niveau de son oreille, et j'ai simplement chuchoté :
« Merci, Al. »
Puis, je me suis assise à ses côtés, coudes sur la table et le regard dans le vide.
« Mais je ne ferai pas semblant. Vous… je ne mérite plus ça. Parce que même si j'essaie, j'ai tellement enfoncé la porte dont je t'ai parlée… alors je ne le ferai pas. Mais au moins… Comme dans la chanson de Mercury.»
Au moins, j'essaierais de ne plus pleurer. Ça ne marcherait pas, du moins pas entièrement. Mais j'aurais essayé, même si des torrents touts entiers se mettaient à couler, dedans. Je me suis décalée et, après un infime moment d'hésitation, j'ai déposé une main sur son épaule.
« Et si j'en peux plus d'avancer, je pourrai toujours revenir voir un certain idiot pour qu'il me remonte le moral. »
J'ai souri doucement, puis je lui ai dit sans hausser le ton :
« Oublie cette dernière phrase, ça ne pourrait pas marcher même on essayait très fort. »
Et puis, je ne le méritais pas.
Je voyais bien où cheminait l'argument, il était assez clair. Mais je n'étais pas d'humeur à faire l'effort de l'accepter. Puis vint la dernière phrase de son long monologue. C'était tellement stupide… Je me suis prise à rire à travers mes sanglots. Ce n'était pas un rire très agréable, mais je n'arrivais pas à le réprimer. Quand il finit par se calmer dans une quinte dans toux misérable, j'avais mal à la gorge et la poitrine en feu. Je n'ai pas osée regarder Al. J'avais trop honte de moi. Pourtant, c'était tellement stupide… Je n'ai pas pu m'empêcher de trouver ça drôle, et malgré tout très triste. Quelque chose a bougé en moi.
« … Tu sais, Al… avant tout ça, j'étais une abrutie. J'avais de comptes à rendre à personne. Merde, j'ai même quitté Alice Springs parce que l'endroit me faisait chier… juste pour ça. Tu te rends compte, Al ? Je suis la pire. Quand je n'aime pas quelque chose, je le laisse sur le bas-côté sans regarder derrière moi. J'ai jamais eu quelqu'un parce que personne ne voulait de moi. Tu veux savoir pourquoi ? Parce que je faisais semblant. J'ai passé toute ma vie à fuir, et je vais pas m'arrêter là.»
Le rire est reparti de plus belle, haché par les saccades de ma respiration.
« Je suis la pire, Al. J'ai fait ma vie planquée derrière une putain de porte, et j'en ai même pas profité parce que le jour où j'ai voulu l'ouvrir, je l'avais tellement bien fermée qu'elle bougeait pas d'un centimètre. Alors, Al… pour la dernière fois… je peux plus faire semblant. »
J'ai pris plusieurs secondes de pause, pour calmer mes sanglots et essuyer mes larmes. Et puis, après une longue inspiration et une certaine préparation, j'ai dit ça :
« Plus maintenant qu'il y a un truc qui compte. Je peux pas tout changer, mais je peux espérer, au moins... changer de direction. »
Je me suis relevée et je me suis approchée de lui, et j'ai réalisé qu'il était vraiment petit. Je me suis penchée au niveau de son oreille, et j'ai simplement chuchoté :
« Merci, Al. »
Puis, je me suis assise à ses côtés, coudes sur la table et le regard dans le vide.
« Mais je ne ferai pas semblant. Vous… je ne mérite plus ça. Parce que même si j'essaie, j'ai tellement enfoncé la porte dont je t'ai parlée… alors je ne le ferai pas. Mais au moins… Comme dans la chanson de Mercury.»
Au moins, j'essaierais de ne plus pleurer. Ça ne marcherait pas, du moins pas entièrement. Mais j'aurais essayé, même si des torrents touts entiers se mettaient à couler, dedans. Je me suis décalée et, après un infime moment d'hésitation, j'ai déposé une main sur son épaule.
« Et si j'en peux plus d'avancer, je pourrai toujours revenir voir un certain idiot pour qu'il me remonte le moral. »
J'ai souri doucement, puis je lui ai dit sans hausser le ton :
« Oublie cette dernière phrase, ça ne pourrait pas marcher même on essayait très fort. »
Et puis, je ne le méritais pas.
- Résumé:
- Amelia finit par arrêter de pleurer, et dit "merci" à Al pour l'avoir consolée. Elle lui dit aussi un truc plus ou moins sérieux juste derrière.
Invité
Invité
Jeu 25 Aoû - 21:51
C'était drôle à ce point ? D'une certaine manière, entendre les rires s'infiltrer ainsi sans préambule dans les pleurs l'avait amusé. Ou plutôt, avait fait retomber une partie de la pression qui l'accablait, chassé les larmes qui s'apprêtaient à en faire l'être le plus ridicule sur Terre - pour en faire au moins le plus mort de honte, certes. Son nom complet était un affreux jeu de mots pour dire que tout irait bien, mais il aimait d'autant plus les mathématiques qu'elles n'aient pas encore écrasé désespérément ses tentatives pour les comprendre.
Avec les gens, c'était un peu différent. Al réalisait seulement maintenant qu'il ne connaissait pas Amélia. Ni avant, ni après, ni sur le moment présent. Il s'était écharpée avec elle mais il n'avait aucune foutue idée de ce qu'était Alice Springs et de quelle genre de vie elle aurait pu avoir. Elle aussi ignorait probablement qui il avait été. Cela ne les avait pas empêchés de se mettre en pièce à tour de rôle.
Alors un remerciement après ça ? Une voix intérieure s'était lancé dans un fou rire, le genre qui recouvrirait si facilement toute la conversation. Lui, non, bien sûr… Ill avait presque retenu son souffle sur le moment. Pendant qu'elle continuait, qu'elle se ressaisissait, il se demandait ce qu'il foutait là à ne rien dire. Il aurait certainement dû se lever, faire un truc, mais pour dire quoi ?
« Et si j'en peux plus d'avancer, je pourrai toujours revenir voir un certain idiot pour qu'il me remonte le moral.
Oublie cette dernière phrase, ça ne pourrait pas marcher même on essayait très fort. »
S'il n'avait pas acquis la terrible technique du « dans certaines situations, réfléchis avant de l'ouvrir », il lui aurait probablement rétorqué à toute vitesse qu'elle avait plus de chances de retrouver le moral en allant voir un véritable idiot dans la trempe de Striky. (Il n'avait pas beaucoup d'espoir dans le potentiel guerrier du prétendu super-héros, mais la self-estime avait cruellement baissé dernièrement)
« J'ai plus de chances de trouver le mystère de l'Esquisse que de devenir un bon soutien psychologique, en effet… »
Non, ce n'était certainement pas ce qu'il devait dire.
Ni ce qu'elle voulait entendre.
Il se passa rapidement main sur le visage - des fois que - et fit ce par quoi il aurait dû commencer. Faire pivoter à pi/2 radians sa tête et regarder droit dans les yeux Amelia. Maintenant qu'il la voyait d'aussi prêt, il constatait à quel point elle avait été.. défigurée. Transformée ? Comment devait-il qualifier un tel changement ? Il ressentait un affreux décalage entre ce qu'il savait et ce qu'il percevait. Seul son cerveau savait qu'il s'agissait de cette même personne à qui il avait parlé plus tôt dans la journée. Le reste entendait, voyait et sentait une toute autre chose.. Une inconnue. S'ils sortaient un jour de l'Esquisse, pourrait-elle seulement reprendre sa vie ?
Probablement pas. Ouais, tu m'étonnes que ça mine le moral. Il était juste trop égoïste pour le remarquer avant d'imaginer ce que cela serait, s'il avait été à sa place.
Ce qu'il aurait voulu entendre de sa bouche...
« Mais je suppose que je suis là... oui… » hasarda-t-il, un peu (beaucoup) gêné.
Si tu trouves une meilleur qualificatif que "certain idiot", ceci dit.
Son cerveau se perdit à en imaginer tous les "Sauf si" qu'il pourrait objectif. Enfin… N'était-ce pas plutôt pour masquer un "Même si" qui avait trop de peine à se frayer un chemin jusqu'à ses cordes vocales ?
Avec les gens, c'était un peu différent. Al réalisait seulement maintenant qu'il ne connaissait pas Amélia. Ni avant, ni après, ni sur le moment présent. Il s'était écharpée avec elle mais il n'avait aucune foutue idée de ce qu'était Alice Springs et de quelle genre de vie elle aurait pu avoir. Elle aussi ignorait probablement qui il avait été. Cela ne les avait pas empêchés de se mettre en pièce à tour de rôle.
Alors un remerciement après ça ? Une voix intérieure s'était lancé dans un fou rire, le genre qui recouvrirait si facilement toute la conversation. Lui, non, bien sûr… Ill avait presque retenu son souffle sur le moment. Pendant qu'elle continuait, qu'elle se ressaisissait, il se demandait ce qu'il foutait là à ne rien dire. Il aurait certainement dû se lever, faire un truc, mais pour dire quoi ?
« Et si j'en peux plus d'avancer, je pourrai toujours revenir voir un certain idiot pour qu'il me remonte le moral.
Oublie cette dernière phrase, ça ne pourrait pas marcher même on essayait très fort. »
S'il n'avait pas acquis la terrible technique du « dans certaines situations, réfléchis avant de l'ouvrir », il lui aurait probablement rétorqué à toute vitesse qu'elle avait plus de chances de retrouver le moral en allant voir un véritable idiot dans la trempe de Striky. (Il n'avait pas beaucoup d'espoir dans le potentiel guerrier du prétendu super-héros, mais la self-estime avait cruellement baissé dernièrement)
« J'ai plus de chances de trouver le mystère de l'Esquisse que de devenir un bon soutien psychologique, en effet… »
Non, ce n'était certainement pas ce qu'il devait dire.
Ni ce qu'elle voulait entendre.
Il se passa rapidement main sur le visage - des fois que - et fit ce par quoi il aurait dû commencer. Faire pivoter à pi/2 radians sa tête et regarder droit dans les yeux Amelia. Maintenant qu'il la voyait d'aussi prêt, il constatait à quel point elle avait été.. défigurée. Transformée ? Comment devait-il qualifier un tel changement ? Il ressentait un affreux décalage entre ce qu'il savait et ce qu'il percevait. Seul son cerveau savait qu'il s'agissait de cette même personne à qui il avait parlé plus tôt dans la journée. Le reste entendait, voyait et sentait une toute autre chose.. Une inconnue. S'ils sortaient un jour de l'Esquisse, pourrait-elle seulement reprendre sa vie ?
Probablement pas. Ouais, tu m'étonnes que ça mine le moral. Il était juste trop égoïste pour le remarquer avant d'imaginer ce que cela serait, s'il avait été à sa place.
Ce qu'il aurait voulu entendre de sa bouche...
« Mais je suppose que je suis là... oui… » hasarda-t-il, un peu (beaucoup) gêné.
Si tu trouves une meilleur qualificatif que "certain idiot", ceci dit.
Son cerveau se perdit à en imaginer tous les "Sauf si" qu'il pourrait objectif. Enfin… N'était-ce pas plutôt pour masquer un "Même si" qui avait trop de peine à se frayer un chemin jusqu'à ses cordes vocales ?
- Spoiler:
Résumé : Al dit qu'il est pas sûr d'être utile, mais qu'il sera là quand même
Invité
Invité
Lun 26 Sep - 22:03
A cet instant de ma conversation, quelque chose bascula. Je me rendis compte de deux choses : en premier lieu, Al était un crétin fini. Il n'était pas juste mauvais avec les gens : Il ne savait pas écouter, ni répondre. C'était exaspérant. La deuxième chose ,par contre, me concernait directement. Je n'avais rien à dire.
En réalité, je n'étais pas mieux lotie que l'abruti borné assis en face de moi. Al avait réussi à me calmer, et il m'avait enlevé par la même occasion toutes les paroles qui étaient massées dans ma gorge. Sans l'émotion pour me pousser ni le maquillage ridicule derrière lequel je m'étais cachée, il ne restait que moi. Et je n'aimais pas ça.
J'ai cherché quelque chose à dire pendant ce qui m'a semblé deux bonnes heures. Les mots fluaient et refluaient dans le fond de ma gorge, jamais décidés à sortir. J'ai ouvert la bouche, plusieurs fois. Je l'ai beaucoup fermée. Et puis les paroles ont fini par revenir.
« Eh, Al… je suis comment ? Je veux dire, tout… Qu'est-ce qui a vraiment changé chez moi ? »
C'était une question parfaitement ridicule, et j'en étais consciente, mais c'était également la seule que j'avais à poser. Celle-là ou une autre ; une autre que je ne tenais pas à formuler. Mais malgré tout… je crois que c'était également une question importante pour moi. Je voulais une réponse, une vraie, parce que je ne savais pas à quel point je n'étais plus la même. Je me sentais plus forte, plus grande. Plus vieille, aussi, comme si j'avais grandi de cinquante ans d'un coup : ma crise avait dû jouer un rôle dans cette partie là. Al aussi, par extension. J'ai embrassé toutes ces pensées, je les ai laissés s'exprimer. Et puis j'ai continué. Tout revenait naturellement. Tous les mots que j'avais gardés.
« Je n'aime pas ça, tu sais. Tout ça. Le monde, le reste. Moi. Ce qui s'est passé… »
J'ai regardé le plafond. Tout pour ne pas regarder Al. Trop gênée. Il m'aurait fait m'arrêter en plein milieu.
« Qui je suis. C'est une question facile, pas vrai ? Je suis Amelia Jane Walker, et toi, t'es Al quelque chose. Autour, il y a Imogen, Mark, Ji-Sung, Ziza et tous les autres… et dans tout ça, il ne doit y avoir qu'Imogen qui puisse vraiment comprendre. Comprendre ce qui se passe maintenant, là-haut. »
J'ai tapoté ma tempe, et ai à nouveau résisté à la tentation de lui jeter un regard en coin.
« Qui suis-je. Qui… même ma voix a changé. Est-ce que je suis vraiment Amelia ? L'Amelia d'avant ? Est-ce que je suis une autre qui croit être moi ? Si c'est le cas, d'où viennent tous mes souvenirs ? Ils sont inventés ? Recréés ? Et si c'est le cas, comment est-ce que je pourrais le savoir ? Est-ce que je suis juste apparue, à l'instant, et que depuis ce moment j'ai toujours existé ? »
Je me suis rabattue brusquement sur la table et ai pris ma tête dans mes mains. J'ai regretté. Infiniment. Regretté de m'être ainsi ouverte à quelqu'un dont je ne savais rien. Regretté de n'avoir pensé qu'à moi. Regretté d'avoir vécu aussi bêtement pendant autant d'années. Et regretté de me permettre de me poser toutes ces questions. Puis je me suis redressée, avec un air aussi résolu que minable : autant aller au bout des choses.
« Al… dis-moi si tu trouves une réponse. Un jour. En attendant… merci, encore. Et puis pardon. »
J'ai souri, de ce genre de sourire minable que font les gens qui ont beaucoup pleuré. Et puis, je lui ai dit :
« Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ? »
Tout pour lui changer les idées. Il n'était pas prêt à répondre à tout ça, je le savais, même si j'aurais quand même apprécié un miroir.
J'ai laissé passer un bâillement. A quand remontait ma dernière réelle nuit ?
En réalité, je n'étais pas mieux lotie que l'abruti borné assis en face de moi. Al avait réussi à me calmer, et il m'avait enlevé par la même occasion toutes les paroles qui étaient massées dans ma gorge. Sans l'émotion pour me pousser ni le maquillage ridicule derrière lequel je m'étais cachée, il ne restait que moi. Et je n'aimais pas ça.
J'ai cherché quelque chose à dire pendant ce qui m'a semblé deux bonnes heures. Les mots fluaient et refluaient dans le fond de ma gorge, jamais décidés à sortir. J'ai ouvert la bouche, plusieurs fois. Je l'ai beaucoup fermée. Et puis les paroles ont fini par revenir.
« Eh, Al… je suis comment ? Je veux dire, tout… Qu'est-ce qui a vraiment changé chez moi ? »
C'était une question parfaitement ridicule, et j'en étais consciente, mais c'était également la seule que j'avais à poser. Celle-là ou une autre ; une autre que je ne tenais pas à formuler. Mais malgré tout… je crois que c'était également une question importante pour moi. Je voulais une réponse, une vraie, parce que je ne savais pas à quel point je n'étais plus la même. Je me sentais plus forte, plus grande. Plus vieille, aussi, comme si j'avais grandi de cinquante ans d'un coup : ma crise avait dû jouer un rôle dans cette partie là. Al aussi, par extension. J'ai embrassé toutes ces pensées, je les ai laissés s'exprimer. Et puis j'ai continué. Tout revenait naturellement. Tous les mots que j'avais gardés.
« Je n'aime pas ça, tu sais. Tout ça. Le monde, le reste. Moi. Ce qui s'est passé… »
J'ai regardé le plafond. Tout pour ne pas regarder Al. Trop gênée. Il m'aurait fait m'arrêter en plein milieu.
« Qui je suis. C'est une question facile, pas vrai ? Je suis Amelia Jane Walker, et toi, t'es Al quelque chose. Autour, il y a Imogen, Mark, Ji-Sung, Ziza et tous les autres… et dans tout ça, il ne doit y avoir qu'Imogen qui puisse vraiment comprendre. Comprendre ce qui se passe maintenant, là-haut. »
J'ai tapoté ma tempe, et ai à nouveau résisté à la tentation de lui jeter un regard en coin.
« Qui suis-je. Qui… même ma voix a changé. Est-ce que je suis vraiment Amelia ? L'Amelia d'avant ? Est-ce que je suis une autre qui croit être moi ? Si c'est le cas, d'où viennent tous mes souvenirs ? Ils sont inventés ? Recréés ? Et si c'est le cas, comment est-ce que je pourrais le savoir ? Est-ce que je suis juste apparue, à l'instant, et que depuis ce moment j'ai toujours existé ? »
Je me suis rabattue brusquement sur la table et ai pris ma tête dans mes mains. J'ai regretté. Infiniment. Regretté de m'être ainsi ouverte à quelqu'un dont je ne savais rien. Regretté de n'avoir pensé qu'à moi. Regretté d'avoir vécu aussi bêtement pendant autant d'années. Et regretté de me permettre de me poser toutes ces questions. Puis je me suis redressée, avec un air aussi résolu que minable : autant aller au bout des choses.
« Al… dis-moi si tu trouves une réponse. Un jour. En attendant… merci, encore. Et puis pardon. »
J'ai souri, de ce genre de sourire minable que font les gens qui ont beaucoup pleuré. Et puis, je lui ai dit :
« Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ? »
Tout pour lui changer les idées. Il n'était pas prêt à répondre à tout ça, je le savais, même si j'aurais quand même apprécié un miroir.
J'ai laissé passer un bâillement. A quand remontait ma dernière réelle nuit ?
- Résumé:
- Amelia pose des questions compliquées à Al. Parce qu'en fait, y en avait pas assez.
Invité
Invité
Sam 1 Oct - 23:56
[Le RP où Al démontre définitivement qu'il est un homme. Ou pas]
Dis-moi si tu trouves une réponse. Un jour.
Une réponse à quoi ?
J'peux pas savoir qui tu es, Amelia.
La seule réponse qu'Al pouvait lui donner consistait en la simple somme des informations qu'il avait à son sujet, ce qui était particulièrement mince - en particulier si l'on excluait les dix minutes passées. Tout au plus aurait-il quelque ressenti supplémentaire, en général péjoratif. Mais il mentirait d'affirmer qu'il était persuadé d'être face à "Amelia", parce que maintenant qu'elle mentionnait la possibilité, le rouquin ne pouvait la nier. Il n'avait pas d'argument autre que ceux qui coulaient de source, tels que "Tu es toi-même, point barre".
Ouais, il se souvenait d'une fille un peu chiante nommée Amelia. Et il avait en face d'elle une autre fille au physique totalement différent, qui disait être la même personne et était chiante à sa façon aussi. Il avait réellement plus de chances de trouver une solution au merdier global qui les entourait que de lui dire quoi que ce soit de satisfaisant. Du moins pour elle.
C'est pourquoi il accueillit la réplique lancée aussitôt - comme coupure précipitée à la conversation - avec un mélange de satisfaction et de frustration. Frustration parce qu'il avait probablement foiré quelque part, sans savoir exactement où. Frustration aussi parce qu'Al était bien parti pour mijoter sur la fameuse question pendant des lustres. Il avait quelquefois imaginé à quoi cela ressemblerait, s'il sortait de l'Esquisse et revenait dans un temps un peu différent, ou changé physiquement.. Ces perspectives elles seules suffisaient à provoquer un malaise intérieur : qu'en était-il donc du changement soudain de corps ?
Il vivait naturellement pour que cela n'arrive pas, mais dans ce cas cela ne répondait pas à la question. Pourquoi cette jeune femme qui avait pleuré à côté de lui devait-elle vivre ? Pour elle, alors qu'elle n'était pas sûre de ce qu'elle était ? Pour son passé dont elle n'était même plus sûr ? Pour un avenir incertain et probablement teinté de guerre ? Pour la Base, remplie de gens qui ne la comprenaient pas, lui y compris ? Ce à quoi la logique d'Al ne peut répondre, elle le casse derrière des tapisseries de faux discours ou le range au fin fond d'un tiroir.
En l’occurrence, même s'il aurait rêvé de pouvoir apporter une réponse, les faits étaient là. Il n'en avait pas, et ce fait était indubitable. Dieu qu'il détestait cette impossibilité d'apporter une solution. Dieu qu'elle le trouait de l'intérieur. Alors il était obligé de saisir la bouée de sauvetage. Il était obligé de faire le crevard qui préférait parler de ce qui lui plaisait, non sans laisser échapper une expression contrariée.
Après une inspiration quelque peu longuette, qui servait davantage à reprendre ses esprits qu'à marquer l'exaspération, il déclara :
« Il me semble que c'est écrit sur le tableau. La liste des tâches réparties en domaines et classées par ordre d'importance. C'est donc plutôt à moi de te poser la question de ce que tu comptes faire… »
Ouais, y'avait peut-être un symbolisme à la con derrière, du type "Toutes les possibilités te sont ouvertes, trace ton avenir, tu es si indispensable". Ou peut-être qu'il n'en avait pas et qu'il avait sorti la seule chose que le typhon ayant ravagé sa tête lui avait laissé : une preuve concrète du travail abattu au jour 15. Ou peut-être un vomi hideux pour rassembler les deux. Il nuança toutefois sa réplique, qui devait être un peu trop abrupte, par une suggestion :
« Enfin, pour l'instant, il parait qu'Imogen est en ville, probablement en train de chercher un endroit où crécher cette nuit. Une grande tour du côté des habitations, je crois… »
D'ailleurs, cette fois, Imogen allait lui-même dans cette tour… Quoi que cela signifie.
« Au vu du nombre de guerriers actuel, je suppose qu'il n'est pas accompagné. Ce qui est une excellente idée pour une gamine en papier, n'est-ce pas ? »
Sur un trait d'humour qui tombait mal, il se leva et s'étira discrètement, avant de se diriger vers le tableau. Belle technique d'esquive pour ne pas croiser son regard. Pour ne pas dire qu'elle avait ouvert la porte et qu'il avait fui en courant dès qu'il l'avait vue, la queue entre les jambes. Joli.
"Désolé". Pour l'instant, c'est ma seule réponse, et je ne peux pas te dire que tu as bien fait de croire que j'en avais une. C'est probablement pas le cas, tu sais ?
Dis-moi si tu trouves une réponse. Un jour.
Une réponse à quoi ?
J'peux pas savoir qui tu es, Amelia.
La seule réponse qu'Al pouvait lui donner consistait en la simple somme des informations qu'il avait à son sujet, ce qui était particulièrement mince - en particulier si l'on excluait les dix minutes passées. Tout au plus aurait-il quelque ressenti supplémentaire, en général péjoratif. Mais il mentirait d'affirmer qu'il était persuadé d'être face à "Amelia", parce que maintenant qu'elle mentionnait la possibilité, le rouquin ne pouvait la nier. Il n'avait pas d'argument autre que ceux qui coulaient de source, tels que "Tu es toi-même, point barre".
Ouais, il se souvenait d'une fille un peu chiante nommée Amelia. Et il avait en face d'elle une autre fille au physique totalement différent, qui disait être la même personne et était chiante à sa façon aussi. Il avait réellement plus de chances de trouver une solution au merdier global qui les entourait que de lui dire quoi que ce soit de satisfaisant. Du moins pour elle.
C'est pourquoi il accueillit la réplique lancée aussitôt - comme coupure précipitée à la conversation - avec un mélange de satisfaction et de frustration. Frustration parce qu'il avait probablement foiré quelque part, sans savoir exactement où. Frustration aussi parce qu'Al était bien parti pour mijoter sur la fameuse question pendant des lustres. Il avait quelquefois imaginé à quoi cela ressemblerait, s'il sortait de l'Esquisse et revenait dans un temps un peu différent, ou changé physiquement.. Ces perspectives elles seules suffisaient à provoquer un malaise intérieur : qu'en était-il donc du changement soudain de corps ?
Il vivait naturellement pour que cela n'arrive pas, mais dans ce cas cela ne répondait pas à la question. Pourquoi cette jeune femme qui avait pleuré à côté de lui devait-elle vivre ? Pour elle, alors qu'elle n'était pas sûre de ce qu'elle était ? Pour son passé dont elle n'était même plus sûr ? Pour un avenir incertain et probablement teinté de guerre ? Pour la Base, remplie de gens qui ne la comprenaient pas, lui y compris ? Ce à quoi la logique d'Al ne peut répondre, elle le casse derrière des tapisseries de faux discours ou le range au fin fond d'un tiroir.
En l’occurrence, même s'il aurait rêvé de pouvoir apporter une réponse, les faits étaient là. Il n'en avait pas, et ce fait était indubitable. Dieu qu'il détestait cette impossibilité d'apporter une solution. Dieu qu'elle le trouait de l'intérieur. Alors il était obligé de saisir la bouée de sauvetage. Il était obligé de faire le crevard qui préférait parler de ce qui lui plaisait, non sans laisser échapper une expression contrariée.
Après une inspiration quelque peu longuette, qui servait davantage à reprendre ses esprits qu'à marquer l'exaspération, il déclara :
« Il me semble que c'est écrit sur le tableau. La liste des tâches réparties en domaines et classées par ordre d'importance. C'est donc plutôt à moi de te poser la question de ce que tu comptes faire… »
Ouais, y'avait peut-être un symbolisme à la con derrière, du type "Toutes les possibilités te sont ouvertes, trace ton avenir, tu es si indispensable". Ou peut-être qu'il n'en avait pas et qu'il avait sorti la seule chose que le typhon ayant ravagé sa tête lui avait laissé : une preuve concrète du travail abattu au jour 15. Ou peut-être un vomi hideux pour rassembler les deux. Il nuança toutefois sa réplique, qui devait être un peu trop abrupte, par une suggestion :
« Enfin, pour l'instant, il parait qu'Imogen est en ville, probablement en train de chercher un endroit où crécher cette nuit. Une grande tour du côté des habitations, je crois… »
D'ailleurs, cette fois, Imogen allait lui-même dans cette tour… Quoi que cela signifie.
« Au vu du nombre de guerriers actuel, je suppose qu'il n'est pas accompagné. Ce qui est une excellente idée pour une gamine en papier, n'est-ce pas ? »
Sur un trait d'humour qui tombait mal, il se leva et s'étira discrètement, avant de se diriger vers le tableau. Belle technique d'esquive pour ne pas croiser son regard. Pour ne pas dire qu'elle avait ouvert la porte et qu'il avait fui en courant dès qu'il l'avait vue, la queue entre les jambes. Joli.
"Désolé". Pour l'instant, c'est ma seule réponse, et je ne peux pas te dire que tu as bien fait de croire que j'en avais une. C'est probablement pas le cas, tu sais ?
- Spoiler:
- Résumé : Al se résigne à son absence de réponse, quitte à décevoir et à dégrader encore sa fierté, et dit juste à Amelia d'aller voir Imo / quelqu'un qui la comprendra.
Invité
Invité
Mar 11 Oct - 14:19
Nous y étions enfin. L'achèvement d'une conversation. Tous les mots consommés, il ne restait que les miettes. Il n'y avait plus qu'à balayer, ranger les chaises et éteindre les lumières. J'ai jeté un dernier regard à Al, et lui ai souri. Le dernier de la journée, et peut-être mon dernier. J'ai fait un grand effort pour qu'il soit vraiment beau.
« Au revoir, Al. »
Je suis sortie et j'ai fermé la porte. Appuyée sur le battant, je me suis laissée pleurer, en silence. Puis, j'ai essuyé mes larmes, j'ai regardé au loin. Et puis je suis partie.
Pour le premier jour de ma vie.
« Au revoir, Al. »
Je suis sortie et j'ai fermé la porte. Appuyée sur le battant, je me suis laissée pleurer, en silence. Puis, j'ai essuyé mes larmes, j'ai regardé au loin. Et puis je suis partie.
Pour le premier jour de ma vie.
- Résumé d'un petit post pour une petite fin.:
- Amelia dit au revoir et s'en va.
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