Epreuve 5 - L'épopée
Silivren[NRP]
Invité
Dim 24 Mar - 18:56
Anoushka est une petite fille de sept ans et demi qui vit dans la campagne russe, en pleine taïga, dans un village appelé Saint-Champs. Vous ne le trouverez nulle part sur les cartes mais il n'est pas loin de Tomsk, en plein milieu de l'immense Russie. Anou est une zoothrope qui peut se transformer en louve noire mais elle contrôle encore mal ce pouvoir. Et elle ne parle pas très bien, butant surtout sur les -r, donc bonne chance pour la lire. Je me suis inspirée d'un conte russe largement repris parce que je le connais pas si bien que ça x3. D'ailleurs, c'est un conte qui frise l'apologie de la zoothropie, il doit tellement être interdit dans Chimères xD. Je ne sais pas où elle a pu entendre cette histoire, la petiote. Et oh ! Un moment, qui vous paraîtra très très étrange, c'est une référence à un rp de notre Faille qui est considéré comme un rêve.
Bonne lecture.
Les jours de neige avaient dépassé deux fois les dix doigts de la main d'Anoushka. La petite fille sautillait devant la fenêtre. Le ciel était chargé de sombres nuages mais il avait cessé de cracher ses larmes.
Anoushka attendait impatiemment que Dedoula revienne du pré où il avait sorti les moutons. Elle avait tellement envie de descendre à Saint-Champs ! Comme chaque hiver, elle était bloquée avec ses grands-parents dans leur maison sur la colline qui surplombait le petit village.
- Anoushka ! gronda une vieille femme. La fenêtre... Pire que Sobaka.
Anoushka tourna vers Baboula un regard contrit.
- C'est que j'veux so'ti, moi ! J'veux aller voi' Andrei et les aut'es et jouer 'vec l'neige ! Et...
Baboula la coupa gentiment avec un coup de chiffon sur le nez.
- Doucement,je ne comprends rien quand tu parles trop vite. Et tu manges encore tes -r, sauf à Andrei bien évidemment.
- C'est que j'ai faim, moi aussi, Baboula, rétorqua-t-elle avec aplomb.
- Tu as toujours faim.
- C'la louve !
Baboula volta vers elle avec une étonnante souplesse et lui ferma la bouche d'une main ferme.
- Chut ! Pas si fort.
Elle se tortilla pour échapper à la poigne et s'apprêtait à renchérir lorsque la porte s'ouvrit sur la silhouette de Dedoula.
- Et elle va pouvoir aller jouer.
Un immense chien jaillit dans la maison dès que la voie fut libre. Sa fourrure grise, noire et blanche avait triplé de volume depuis les premiers frimas. Sa gueule rappelait le berger du Caucase mais ses yeux bleus et la forme mi-droite mi-courbée de ses oreilles trahissaient son sang sibérien.
- Sobaka ! M'a manqué.
- Depuis seulement quelques heures, s'amusa Dedoula. Baboula était partie en cuisine pour ranger des casses-croûtes dans une petite sacoche qu'elle lui amena avec tout un attirail pour lutter contre le froid.
- J'peux y aller, maint'nant ? J'peux y aller, n'hein ? débita-elle à toute vitesse sur le pas de la porte.
- Pas sans ça ! la héla la voix de Dedoula depuis le cellier duquel il ressortit avec une luge et un harnais. Des étoiles vinrent danser dans les yeux d'Anouhska.
- Guiiiiiiii !! Sobaka va me ti'er !! Ouais ! Ouais ! Ouais !
Elle sautait encore en l'air comme un pou géant quand son grand-père annonça qu'il avait fini d'attacher le chien. Il la fixa d'un air sévère.
- Tu vas SEULEMENT au village et tu reviens, est-ce clair ?
- Oui, po'mis.
- Alors file.
Les pieds sur la luge, les mains sur les rênes et en avant ! Sobaka s'avança sans hésitation dans la pente qui menait au village. Et alors que le vent fouettait son visage, que ses oreilles en sifflaient et qu'elle ne voyait plus rien, Anoushka hurlait ses éclats de rire qui se répercutaient dans les collines alentours.
Elle aurait dû arriver aux abords de Saint-Champs en quelques minutes... mais elle ne ralentissait pas alors que la pente aurait dû se finir ni ne voyait les premières bâtisses alors qu'elles auraient dû se trouver devant elle.
- Oh, oh, Soba.
Le chien pila pour s'arrêter et regarda sa petite maîtresse avec un air curieux. Anoushka fixait l'arrière, essayant de distinguer sa maison. Peine perdue ! Elle s'était égarée...
- Faut 'ester calme, Soba, murmura-t-elle à son ami qui ne fit que pencher la tête sur le côté avec un couinement interrogatif. C'était elle qui sonnait inquiète, pas le chien. Anoushka déglutit en observant les alentours : elle ne reconnaissait aucun buisson, aucun arbre, aucune pierre. Pourtant, elle aurait dû connaître par cœur ce sentier ! Elle avait dû prendre une mauvaise bifurcation sans s'en rendre compte en allant trop vite.
- C'pas ga've, j'connais la fo'êt et j'suis une louve.
Comme si le fait de l'avoir dit à voix haute avec autant d'ardeur avait agi comme un sésame, elle se retrouva soudainement avec ses oreilles et sa queue noires. Glapissant, elle plaqua la queue entre ses jambes et les oreilles sous sa capuche. Elle savait pourtant qu'elle ne devait pas se transformer n'importe où ! C'était dangereux ! Même ses amis iraient la dénoncer au prêtre de Saint-Champs s'ils apprenaient sa zoothropie.
- Tu es perdue, jeune louve ?
Elle couina d'autant plus en se pressant contre sa luge, comme si elle espérait s'y cacher et ainsi tout faire rentrer dans l'ordre. Sobaka gronda sur l'inconnu qui les avait abordés et elle l'entendit reculer prudemment.
- Ne craignez rien.
Comme son ton était gentil, Anoushka retrouva assez de courage pour le fixer dans les yeux.
- J'suis po perdue !
L'homme sourit, visiblement ravi.
- Tant mieux ! Je suis le prince Ivan. Mon ennemi Kochtcheï, que j'ai libéré par pitié, a enlevé ma femme Maria Morevna. Je dois retrouver mes beaux-frères et j'ai grand besoin de l'aide d'une fille de la forêt.
Anoushka cligna des yeux d'un air effaré.
- Comment ?
- Ils sont faucon, aigle et corbeau. Je dois les trouver.
Miracle ! D'un coup, tout fut clair dans son esprit ; elle savait.
- Y do'ment au coeu' de l'fo'êt.
- Et peux-tu m'y mener ?
Le Seigneur n'avait-il pas dit d'aider son prochain ? Elle hocha la tête.
- Montez, M'sieur Ivan.
La luge était étonnement assez solide pour porter un homme adulte en plus d'une fillette.
- Va, Sobaka, va !
Et ils s'élancèrent entre les buissons d'épines puis les taillis de baies hivernales jusqu'à atteindre les grands conifères de la taïga et enfin le cœur de la forêt.
- Beaux-frères, chères sœurs, je mande votre aide. Kochtcheï m'a blessé à mort, je me sens faiblir. Vous avez dû le voir quand vos objets d'argent ont terni.
Il semblait si pâle tout d'un coup. Anoushka dut l'aider à tenir debout jusqu'à ce que plumages et douces mains vinrent le soutenir. Ils l'emmenèrent avec eux et le lavèrent d'eau morte puis d'eau vive. Quand il revint, un nouveau feu dansait dans ses yeux.
- Maintenant, petite louve, fille des bois, je dois voir Baba Yaga car j'ai besoin d'un cheval magique pour rivaliser avec la célérité de celui de Kochtcheï.
Anoushka n'osa pas lui dire qu'elle ne voyait pas ce qu'un céleri avait à voir avec un cheval, tout magique fut-il. Baba Yaga, elle ne la craignait pas, elle l'avait déjà affrontée sous les océans aux commandes de son dirigeable !
- Va, Sobaka, va !
Et ils s'élancèrent entre les grands conifères de la taïga, les taillis de baies hivernales et les buissons d'épines pour arriver dans un marais malheureux.
- Baba Yaga ! tonna Ivan. Donne-moi un cheval pour concurrencer l'étalon de Kochtcheï !
- Et pourquoi le ferais-je ? gronda la sorcière en sortant de sa cabane dans une gerbe de fumées noires. Anoushka sauta de la luge en montrant les crocs ; d'un coup, elle avait réussi à totalement se transformer en louve. Son pelage d'onyx fit blêmir les pâles nuances du maléfice de la sorcière.
- Bien, dit-elle d'une voix plus encline à parlementer. Tu aurais ton étalon si tu me gardes mes cavales pendant trois nuits.
- Je le ferai !
Mais une fois devant les cavales, Ivan se laissa tomber à terre en gémissant qu'il ne saurait garder ce troupeau. Alors Anoushka aboya de rire et fusa vers les cavales, Sobaka en miroir sur l'autre flanc, et ils rassemblèrent la harde avec habileté ; aucune des cavales ne leur échappa durant les trois jours. Sûrs de leur victoire, ils retournèrent donc voir Baba Yaga.
Qui, folle de rage ! les menaça de ses mauvais sorts. Rien n'y fit, ni l'épée d'Ivan ni les crocs de la louve noire et ils durent fuir.
- Un che'al ! s'exclama Anoushka alors qu'il dévalait sur la neige près d'un champ. Il s'agissait d'un poulain miteux mais il appartenait au haras de la sorcière. Ivan se jucha sur son dos et s'envola vers les conifères ; il s'avéra qu'il mua en un splendide étalon plus rapide que celui de Kochtcheï.
Et...
- Anoushka ! Réveille-toi ! Anoushka !!
Les cris et les pleurs qui les accompagnaient la firent difficilement émerger. Elle cligna des paupières et avisa le visage inquiet d'Andrei.
- Le p'ince Ivan t'ouve M'ria Mo'e'na et y vivent heu'eux.
- Tu as réussi à glisser et te cogner la tête, lui indiqua Andrei en l'aidant à se relever. Maksim pleurait en arrière-plan, consolée par Louka et Natya. Anoushka se frotta le crâne (en s'assurant au passage que, non, elle n'était pas transformée) et sourit bêtement.
- Même po mal ! Z'avez faim ?
Un concert d'acquiescement lui répondit. Plus de peur que de mal, au final, et une belle histoire.
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